Leracisme Ă  travers l’histoire: choses, mots et idĂ©es Le racisme est aussi ancien que l’humanitĂ©. Mais c’est au XIXe siĂšcle qu’il prend une forme thĂ©orique puis devient un programme politique meurtrier. nicole sAVY, coresponsable du groupe de travail LDH «Femmes, genre, Ă©galité» O n ne fera que survoler les faits car le racisme, comme le Victoire les saveurs et les mots et Mets et merveilles ont essayĂ© de prouver que la crĂ©ation est multiforme et qu’il n’y a pas de hiĂ©rarchie entre nourrir avec des mains et nourrir avec des mots, c’est le mĂȘme effort. [] j’ai essayĂ© de prouver qu’écriture et cuisine provenaient du mĂȘme effort de crĂ©ation. 27sept. 2018 - Apprendre Ă  Ă©crire des mots sur le thĂšme du jardinage. Cette activitĂ© amĂšne progressivement l'Ă©lĂšve reconnaĂźtre les lettres de l’alphabet, connaĂźtre les correspondances entre les maniĂšres de les Ă©crire (script et capitales d’imprimerie) et LaurĂ©atede la rĂ©sidence Jeunesse 2021, l’artiste Loren Capelli a Ă©tĂ© accueillie Ă  l'Ă©tĂ© 2021 au Chalet Mauriac pour travailler sur son projet Jardin-enfants. En communion avec la nature, celui-ci ouvre l’univers de la petite enfance au monde du vivant. Depuis plus de dix ans, l’autrice s’exprime dans le champ de la littĂ©rature jeunesse et ailleurs Ă  CamilleÉtienne, 24 ans, milite pour la justice sociale et climatique Ă  travers des actions de lobbying, de dĂ©sobĂ©issance civile, artistiques, juridiques. En 2 ans, elle est devenue une figure du mouvement climat en additionnant des vidĂ©os poĂ©tiques d’une grande force Ă©vocatrice et mille actions pour les causes qui lui tiennent Ă  cƓur. À travers les mots & Entre les mots". 4,10,867 à€Șà€žà€‚à€Š · 1,07,123 à€‡à€ž à€Źà€Ÿà€°à„‡ à€źà„‡à€‚ à€Źà€Ÿà€€ à€•à€° à€°à€čà„‡ à€čà„ˆà€‚. Les mots sont la plus belle conquĂȘte de l’homme. Ils nourrissent notre quotidien, enrichissent notre pensĂ©e . Disciplines Langage oral et Ă©crit, Etude de la langue, Culture littĂ©raire et artistique et Enseignement moral et civique Niveaux 3Ăšme. Auteur M. CARPIER Objectif - Revoir la versification. - S'entraĂźner Ă  la lecture analytique. - Comprendre les mĂ©canismes de l'engagement. - Lire et comprendre des poĂšmes et des chansons. - Étudier des figures de style et procĂ©dĂ©s poĂ©tiques. Relation avec les programmes Cycle 4 - Programme 2016 Lire un texte Ă  haute voix de maniĂšre claire et intelligible ; dire de mĂ©moire un texte littĂ©raire ; s'engager dans un jeu les ressources de la voix, de la respiration, du regard, de la des techniques multimodales textes, sons et images.Utiliser l'Ă©crit pour rĂ©flĂ©chir, se crĂ©er des outils de rĂ©ponse Ă  une consigne d'Ă©criture, produire un Ă©crit d'invention s'inscrivant dans un genre littĂ©raire du programme, en s'assurant de sa cohĂ©rence et en respectant les principales normes de la langue par Ă©crit et sur des supports variĂ©s papier, numĂ©rique un sentiment, un point de vue, un jugement argumentĂ© en tenant compte du destinataire et en respectant les principales normes de la langue la sensibilitĂ© Ă  la beautĂ© des textes poĂ©tiques et s'interroger sur le rapport au monde qu'ils invitent le lecteur Ă  Ă©prouver par l'expĂ©rience de leur sur les notions d'engagement et de rĂ©sistance, et sur le rapport Ă  l'histoire qui caractĂ©rise les Ɠuvres et textes le sens et l'importance de l'engagement individuel ou collectif des citoyens dans une le lien entre l'engagement et la responsabilitĂ©. - En quoi la poĂ©sie permet-elle de dĂ©noncer ? - SĂ©quence de 3e dĂ©diĂ©e Ă  l'Ă©tude de poĂšmes engagĂ©s. - Projet final rĂ©daction et mise en voix d'un poĂšme engagĂ©. - ThĂ©matiques "Visions poĂ©tiques du monde / DĂ©noncer les travers de la sociĂ©tĂ©". DĂ©roulement des sĂ©ances SĂ©ance 1 A mon frĂšre blanc, de LĂ©opold Sedar Senghor - Langage oral et Ă©crit, 55 minSĂ©ance 2 Les thĂ©matiques liĂ©es Ă  l'engagement - Enseignement moral et civique, 55 minSĂ©ance 3 Je trahirai demain, de Marianne Cohn - Langage oral et Ă©crit, 55 minSĂ©ance 4 Vous qui savez, de Charlotte Delbo - Langage oral et Ă©crit, 55 minSĂ©ance 5 MĂ©lancholia, de Victor Hugo - Langage oral et Ă©crit, 110 min 1 A mon frĂšre blanc, de LĂ©opold Sedar Senghor DerniĂšre mise Ă  jour le 08 aoĂ»t 2018 Discipline / domaine Langage oral et Ă©crit Objectif - Lire et comprendre un poĂšme. - RĂ©diger le bilan d'une lecture analytique. - Se sensibiliser au racisme et Ă  la nĂ©gritude. - RepĂ©rer des procĂ©dĂ©s et des figures de style. - Observer et commenter la forme d'un poĂšme. DurĂ©e 55 minutes 3 phases MatĂ©riel - Cahier / classeur - Trousse remplie Informations thĂ©oriques Le mot NĂ©gritude » est un nĂ©ologisme employĂ© pour la premiĂšre fois par AimĂ© CĂ©saire dans son Cahier d’un retour au pays natal », paru en 1939. Une des dĂ©finitions qu’il en donne est La simple reconnaissance du fait d’ĂȘtre noir et l’acceptation de ce fait, de notre destin de noir, de notre histoire et de notre culture. » Remarques Support "A mon frĂšre blanc", poĂšme de LĂ©opold Sedar Senghor. 1. ActivitĂ© 1 Lecture individuelle du poĂšme et travail de repĂ©rage 25 min. recherche Sur votre feuille d’activitĂ©s, faites toutes les remarques et observations nĂ©cessaires sur la prĂ©sentation de ce texte et ses caractĂ©ristiques poĂšme, vers, strophes, syllabes, ponctuation, rimes, jeux de mots etc..Correction et mise en commun en cours dialoguĂ© PoĂšme d'une seule strophe, composĂ©e de 16 vers au total, pas de rimes particuliĂšres, pas de type de vers "Cher frĂšre blanc" qui fait penser au genre Ă©pistolaire, Ă  une lettre qui constituerait un appel Ă  la filĂ©e tout au long du poĂšme, qui fait penser Ă  une chanson ou une comptine que l'on lexical des couleurs dans la totalitĂ© du poĂšme, et toujours en fin de continuel du temps reprĂ©sentĂ© par l'emploi du passĂ© composĂ©, du prĂ©sent et du le mĂȘme systĂšme de ponctuation virgule prĂ©sente Ă  la cĂ©sure du vers, et point Ă  la entre le "je" reprĂ©sentant le poĂšte et l'homme de couleur, et le "tu" reprĂ©sentant l'homme dans le poĂšme Ă  partir du vers 7 "Tandis que toi, homme blanc".Chute du poĂšme reprĂ©sentĂ©e par une question rhĂ©torique qui n'appelle Ă  aucune contre-rĂ©ponse. 2. ActivitĂ© 2 Questions 20 min. recherche ActivitĂ© 2 RĂ©pondez aux questions peut-on dire sur la situation d’énonciation de ce poĂšme ?Quel est la thĂ©matique, le propos voire le message de ce poĂšme ?Quels procĂ©dĂ©s littĂ©raires ou figures de style contient ce poĂšme ?Ce poĂšme contient-il des champs lexicaux ? Si oui, lesquels ?Correction et mise en commun en cours dialoguĂ© Dans ce poĂšme, le poĂšte s'adresse Ă  "tu", qui dĂ©signe "l'homme blanc". Le moment de l'Ă©criture est le prĂ©sent puisque c'est le temps verbal qu'on retrouve Ă  la toute fin du thĂ©matique de ce poĂšme est la nĂ©gritude, ou encore le racisme. Mais son message est avant tout la poĂšme contient une anaphore qu'on retrouve quasiment du dĂ©but Ă  la fin "Quand [...] j'Ă©tais [...]". On retrouve aussi une question rhĂ©torique dans le dernier poĂšme contient deux champs lexicaux majeurs celui des couleurs et celui des Ăąges de la vie humaine. 3. ActivitĂ© 3 Bilan de la sĂ©ance 10 min. mise en commun / institutionnalisation RĂ©digez un court paragraphe de conclusion sur ce Senghor, la nĂ©gritude militante consiste Ă  assumer un passĂ©, Ă  le faire renaĂźtre et Ă  l’actualiser afin que les "nĂšgres" apportent leur contribution Ă  la civilisation de l’universel ». Pour lui La nĂ©gritude est le patrimoine culturel, les valeurs et surtout l’esprit de la civilisation nĂ©gro- Africaine ». Dans ce poĂšme, il joue sur les mots et retourne les arguments de l'homme blanc raciste envers les hommes dits "de couleur". 2 Les thĂ©matiques liĂ©es Ă  l'engagement DerniĂšre mise Ă  jour le 10 aoĂ»t 2018 Discipline / domaine Enseignement moral et civique Objectif - DĂ©finir les termes "valeurs" et "rĂ©volte". - Lire et comprendre des images mobiles. - Comprendre le rapport entre ces deux mots. DurĂ©e 55 minutes 3 phases MatĂ©riel - Cahier / classeur - Trousse remplie Remarques Supports VidĂ©os de la chaĂźne "Et tout le monde s'en fout". - VidĂ©o 1 "Les Valeurs" - VidĂ©o 2 "La RĂ©volte" 1. ActivitĂ© 1 Visionnage des vidĂ©os et prise de note des Ă©lĂšves 30 min. recherche Soyez attentifve pendant le visionnage des deux extraits vidĂ©os. Prenez bien en note les informations qui vous semblent les plus importantes dans chaque vidĂ©o, car on vous posera peut-ĂȘtre quelques questions ensuite
Mise en commun en cours dialoguĂ© "Et tout le monde s'en fout Les Valeurs" Les valeurs sont Ă©volutives, c'est-Ă -dire qu'elles peuvent changer avec le temps. Elles font partie intĂ©grantes de l'identitĂ© d'une personne. De ce fait, chaque individu possĂšde ses propres valeurs, qui peuvent ĂȘtre diffĂ©rentes de celles des autres. Il est essentiel de choisir soi-mĂȘme les valeurs que l'on souhaite dĂ©fendre et qui correspondent le plus Ă  notre personnalitĂ©. Attention cependant Ă  ne pas imposer ses valeurs aux autres et Ă  confondre "valeur" et "croyance". Une "valeur" est une chose en laquelle on croit, tandis qu'une "croyance" correspond Ă  des rĂšgles et des choix que l'on met en place pour dĂ©fendre et respecter nos valeurs. Le psychologue Shalom Schwartz a fait le tour du monde pour identifier et lister les valeurs universelles, c'est-Ă -dire celles que quasiment toutes les civilisations et cultures ont en commun."Et tout le monde s'en fout La RĂ©volte" La rĂ©volte dĂ©signe le refus de l'oppression. Le mot vient du latin "revolutio", qui signifie "le retour". Toute rĂ©volution mĂšne gĂ©nĂ©ralement Ă  un "retour" Ă  des rĂšgles passĂ©es. Il est prouvĂ© que les rĂ©voltes non violentes ont obtenu plus de succĂšs que les rĂ©voltes violentes. La rĂ©volte dĂ©signe un sentiment de rĂ©bellion gĂ©nĂ©ralisĂ©, qui mĂšne gĂ©nĂ©ralement Ă  ce qu'on appelle la "rĂ©volution". Le Banquet des AffamĂ©s est une oeuvre de Didier Daeninckx qui raconte les exploits d'un hĂ©ros, Maxime Lisbonne 1839-1905, formidable agitateur qui se relĂšve toujours. 2. ActivitĂ© 2 Liste des causes pour lesquelles l'ĂȘtre humain s'engage 15 min. recherche Faites la liste de toutes les autres causes pour lesquelles les gens, artistes, poĂštes et poĂ©tesses, Ă©crivaines, dramaturges, chanteurseuses, acteurs et actrices ou militantes peuvent s’engager. Trouvez-en un en commun en cours dialoguĂ© IncivilitĂ©RacismeInjusticeSexismeInĂ©galitĂ©ViolencePolitiquePauvretĂ©InsĂ©curitĂ©MisogynieIntolĂ©ranceProstitutionXĂ©nophobieHarcĂšlementHomophobieAntisĂ©mitismeDiscriminationAbus de pouvoir 3. ActivitĂ© 3 Bilan de la sĂ©ance 10 min. mise en commun / institutionnalisation Recopiez en rouge le bilan de la est une dĂ©cision volontaire de participation Ă  un projet, Ă  une action, ou autre, s’inscrivant dans le temps. L’engagement peut se faire Ă  travers un projet personnel ou collectif. Mais il se dĂ©veloppe en littĂ©rature Ă  partir des annĂ©es 1930, et connaĂźtra un peu plus tard un fort engouement grĂące Ă  des Ă©crivains et Ă©crivaines qui le promeuvent tels que Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir. 3 Je trahirai demain, de Marianne Cohn DerniĂšre mise Ă  jour le 10 aoĂ»t 2018 Discipline / domaine Langage oral et Ă©crit Objectif - Pratiquer le repĂ©rage sur texte. - Comprendre l'implicite d'un texte. - DĂ©gager les axes de lecture d'un texte. - RepĂ©rer et analyser des figures de style. - RepĂ©rer et analyser des procĂ©dĂ©s stylistiques. DurĂ©e 55 minutes 4 phases MatĂ©riel - Cahier / classeur - Trousse remplie Remarques Support "Je trahirai demain", poĂšme de Marianne Cohn 1943. 1. ActivitĂ© 1 Lecture individuelle du poĂšme et premiĂšres impressions 25 min. recherche Lisez attentivement le poĂšme ci-dessous et rĂ©digez vos premiĂšres impressions. Pour rappel, les premiĂšres impressions correspondent aux Ă©motions et sentiments que suscitent le texte, aux hypothĂšses de lecture, Ă  ce que vous imaginez en lisant ce en commun en cours dialoguĂ© Un poĂšme poĂšme de la mort Ă  venir de la poĂ©tesse suicide.PoĂ©tesse prisonniĂšre, loin de chez elle, seule, du futur, temps de la certitude, qui reprĂ©sente la qui s'adresse parfois Ă  ses tortionnaires, acte lorsque la poĂ©tesse parle de "trahir la vie" = se de la nĂ©gation, qui montre la dĂ©termination de la rĂ©sistante, et sa entre "aujourd'hui" et "demain" dans le poĂšme souligne le sacrifice de la de l'impĂ©ratif envers ses tortionnaires, qui reprĂ©sente presque un appel Ă  la d'une antithĂšse aux vers 4 et 5 Vous ne savez pas le bout de mon courage. Moi je sais. »PoĂ©tesse qui choisit le suicide plutĂŽt que la trahison envers son pays, sa patrie, sa famille et ses du sens du mot trahison » tout au long du poĂšme, ce qui montre la force de caractĂšre de la de la synecdoqueou mĂ©tonymie les bourreaux sont dĂ©signĂ©s par les parties de leur corps ou leurs vĂȘtements. 2. ActivitĂ© 2 Travail de repĂ©rage 20 min. entraĂźnement Commencez votre travail de repĂ©rage. Utilisez des codes couleurs, indique la lĂ©gende Ă  droite du texte, et n’hĂ©sitez pas Ă  l’annoter c’est-Ă -dire Ă©crire des petites notes sur les cĂŽtĂ©s. 3. ActivitĂ© 3 Travail Ă  faire Ă  la maison pour le cours suivant 0 min. recherche Pour le prochain cours, renseignez-vous et rĂ©digez un petit paragraphe qui prĂ©sente en quelques mots la vie de Marianne Cohn."Marianne Cohn est une rĂ©sistante1 allemande, nĂ©e le 17 septembre 1922 Ă  Mannheim et morte assassinĂ©e le 8 juillet 1944 en Haute-Savoie." Source WikipĂ©dia "DĂšs 1941, la jeune Marianne entre en rĂ©sistance puis participe Ă  la construction du MJS mouvement de la jeunesse sioniste. Puis, sous le pseudonyme de Colin, elle a pour tĂąche de faire passer des enfants juifs vers la Suisse. ArrĂȘtĂ©e en 1943, elle est relĂąchĂ©e au bout de trois mois. C’est de cette pĂ©riode que l’on date – sans en ĂȘtre absolument sĂ»r – la composition du poĂšme Je trahirai demain". Source Philo Français 4. ActivitĂ© 4 Bilan de la sĂ©ance 10 min. mise en commun / institutionnalisation Recopiez en rouge le bilan de la sĂ©ance dans le tableau ci-dessous. Je trahirai demain » est l’un des textes poĂ©tiques les plus reconnus de la Seconde Guerre mondiale. Les circonstances de son Ă©criture sont tragiques et un certain mystĂšre plane sur son auteure effective. NĂ©anmoins, il Ă©voque des Ă©vĂ©nements graves ne pouvant que toucher les consciences contemporaines. Pourtant ce succĂšs, il le doit surtout Ă  la force d’une Ă©criture que l’on peut qualifier de poĂ©tique », c’est-Ă -dire de crĂ©atrice ». 4 Vous qui savez, de Charlotte Delbo DerniĂšre mise Ă  jour le 10 aoĂ»t 2018 Discipline / domaine Langage oral et Ă©crit Objectif - ComplĂ©ter un tableau analytique. - RepĂ©rer / citer des procĂ©dĂ©s littĂ©raires. - Analyser / interprĂ©ter des procĂ©dĂ©s littĂ©raires. DurĂ©e 55 minutes 2 phases MatĂ©riel - Cahier / classeur - Trousse remplie Remarques Support Vous qui savez », poĂšme de Charlotte Delbo, issu du recueil "Auschwitz et aprĂšs Aucun de nous ne reviendra", Éditions de Minuit 1970. 1. ActivitĂ© 1 Lecture individuelle du poĂšme et analyse 45 min. recherche Lisez en silence le poĂšme de Charlotte Delbo, puis complĂ©tez le tableau d’analyse et mise en commun en cours dialoguĂ© PROCEDES LITTERAIRESPASSAGES DU TEXTEANALYSE / INTERPRETATIONAdresse"Vous qui savez" d'interpeler les lecteurs, de les inclure et de faire en sorte qu'ils se sentent concernĂ©sAntithĂšse"[...] que la faim fait briller les yeux / que la soif les ternit" - 3Illustre la souffrance physique des prisonniers des camps, qui passent d'un extrĂȘme Ă  l' du "Ô" lyrique"Ô vous qui savez" v.ProcĂ©dĂ© emphatique, met en avant les Ă©motions fortes de la vous qui savez / saviez-vous [...]" tout au long du poĂšmeOffre au poĂšme un rythme et une musicalitĂ© qui l'apparentent Ă  une chanson / le matin on veut mourir / que le soir on a peur" - 9Montre que les dĂ©portĂ©s retrouvent espoir chaque matin, et le perdent chaque soir aprĂšs leur jour est plus qu’une annĂ©e / une minute plus qu’une vie" - 12Souligne la perte de la notion du temps lorsqu'on est dans les camps. Chaque minute de survie pierres du chemin ne pleurent pas" pierres du chemin" dĂ©signent le trajet qui mĂšne les dĂ©portĂ©s vers les camps, elles sont associĂ©es au verbe pleurer, qui est une action toute la derniĂšre stropheFinalement, toutes ces antithĂšses sont destinĂ©es Ă  dĂ©noncer l'opposi-tion entre le quotidien insoutenable des dĂ©portĂ©s, et le quotidien tran-quille de ceux qui n'ont pas avec les temps verbaux"Le saviez-vous / vous qui savez." - 24L'imparfait sert Ă  former une phrase interrogative destinĂ©e Ă  sous-enten-dre que les lecteurs ne pouvaient pas "savoir" ce que subissaient rĂ©el-lement les dĂ©portĂ©s, vu qu'ils ne l'ont pas vĂ©cu. Quant au prĂ©sent, il rap-pelle que les lecteurs "savent" que toute cette horreur a bien eu lieu. 2. ActivitĂ© 2 Bilan de la sĂ©ance 10 min. mise en commun / institutionnalisation Recopiez en rouge le bilan de la Delbo a 33 ans lorsqu'elle Ă©crit ces vers, en 1946. Elle est hospitalisĂ©e pour soigner un corps meurtri par la dĂ©portation, un cƓur abĂźmĂ© et une Ăąme mal en point. AprĂšs la lutte contre l’occupant nazi dans la rĂ©sistance française, l’emprisonnement, la dĂ©portation Ă  Auschwitz-Birkenau, la libĂ©ration, elle s’est Ă©croulĂ©e. Elle est vaincue par toutes ces morts dont elle n’a pu faire le deuil. Alors, pour repousser les ombres, elle Ă©crit. Elle Ă©crit comme on pleure, en mĂ©moire des disparus. 5 MĂ©lancholia, de Victor Hugo DerniĂšre mise Ă  jour le 11 aoĂ»t 2018 Discipline / domaine Langage oral et Ă©crit Objectif - Pratiquer la lecture analytique. - Enrichir son vocabulaire personnel. - RepĂ©rer et analyser des figures de style. - RepĂ©rer et analyser des procĂ©dĂ©s stylistiques. DurĂ©e 110 minutes 4 phases MatĂ©riel - Cahier / classeur - Trousse remplie Remarques Support MĂ©lancholia », poĂšme de Victor Hugo issu du recueil intitulĂ© "Les Contemplations", Livre III. 1. ActivitĂ© 1 Lecture individuelle du poĂšme + 15 min. dĂ©couverte Lisez attentivement le poĂšme ci-dessous. Puis, Ă©coutez la mise en voix de ce poĂšme en vous montrant attentifve au ton, au rythme et Ă  l’interprĂ©tation. Quelles sont vos premiĂšres impressions sur ce poĂšme ? 2. ActivitĂ© 2 Travail sur le vocabulaire 20 min. recherche Observez bien tous les mots en gras soulignĂ©s dans le sur une copie de deviner vous-mĂȘme le sens de chacun de ces un dictionnaire pour vĂ©rifier vos hypothĂšses et les et mise en commun en cours dialoguĂ© Une meule n. fĂ©m. partie du moulin qui sert Ă  broyer et Ă  moudre la farine ou le bagne n. masc. lieu dans lequel Ă©taient dĂ©tenus les condamnĂ©s aux travaux n. masc. mĂ©tal extrĂȘmement dur et solide, mĂ©lange entre du cuivre et du rachitisme n. masc. maladie de croissance trĂšs grave, qui touche surtout les enfants n. masc. honte dĂ©mesurĂ©e que l'on afflige volontairement Ă  quelqu'un dans le but de l' blasphĂšme n. masc. parole ou acte qui outrage une religion ou une adj. qui est fructueux, riche, fertile, productif. 3. ActivitĂ© 3 Analyse du poĂšme 55 min. recherche Commencez la lecture analytique de ce poĂšme. Voici une liste de tous les Ă©lĂ©ments que vous pouvez observer, repĂ©rer, analyser et interprĂ©ter Quel est le genre de ce texte ? Quels sont les Ă©lĂ©ments qui le prouvent ?À quels temps sont conjuguĂ©s les verbes ? Quelle est leur valeur ?Quels sont les diffĂ©rents champs lexicaux prĂ©sents dans ce texte ?Ce texte a-t-il des particularitĂ©s, une originalitĂ© ?Que peut-on dire de la ponctuation dans ce texte ? Qu’est-ce qu’elle exprime ?Qui est le locuteur ce qui / celui / celle qui parle dans ce texte ?À qui s’adresse le locuteur ?Ce texte contient-il des figures de style ? Lesquelles ? À quoi servent-elles ?Qu’est-ce qui est Ă©voquĂ© dans ce texte, quelles sont les thĂ©matiques abordĂ©es ?Quel message l’auteur cherche-t-il Ă  faire passer ? Que dĂ©nonce-t-il ?Correction et mise en commun en cours dialoguĂ© L'Ă©vocation du travail des enfants dans les dĂ©nonciation des consĂ©quences du travail sur l'ĂȘtre d'une forte indignation. 4. ActivitĂ© 4 Bilan de la sĂ©ance 20 min. mise en commun / institutionnalisation En binĂŽmes, rĂ©digez un bilan de ce poĂšme. Demandez-vous ce que chaque lecteur ou lectrice devrait retenir de ce ce poĂšme, publiĂ© en 1856, Hugo Ă©voque le travail dur et pĂ©nible des enfants. Ce texte dĂ©nonce avant tout l’exploitation des enfants dans les usines de l’époque. Mais il sert Ă©galement Ă  transmettre aux lecteurs les sentiments du poĂšte ainsi que ses idĂ©es de justice et de libertĂ©. Enfin, ce poĂšme est aussi et surtout un instrument de dĂ©nonciation. Pour Hugo, l’écriture doit servir Ă  faire Ă©voluer les mentalitĂ©s. Fermer Nous utilisons un cookie de suivi de navigation pour amĂ©liorer l'utilisation d'Edumoov. ConformĂ©ment au RGPD, tout est anonymisĂ© mais vous pouvez refuser ce cookie. Aller au contenu principal Droit d’auteur sharpner / 123RF Banque d’images En français, la plupart des mots sont d’origine latine. Certains d’entre eux se forment par ajout d’un prĂ©fixe ou d’un suffixe. Il existe plusieurs types de prĂ©fixes et de suffixes. Cet article porte sur les prĂ©fixes et leur sens. PrĂ©sentation Certains mots se forment par ajout d’un prĂ©fixe. Il s’agit d’une particule qu’on met devant un mot porter → transporter. Il existe plusieurs types de prĂ©fixes. En voici quelques-uns parmi les plus courants. I Localisation PrĂ©fixes Sens Exemples en-, em- dans enfermer, emprisonner in, im infiltrer, importer ex-, exo- Ă  l’extĂ©rieur, hors exporter, excentrique, exotique inter- entre intervenir, s’interposer intra- au-dedans intraveineuse mi- milieu midi super- au-dessus superposer sub-, sou- sous subaquatique, souterrain II Moment PrĂ©fixes Sens Exemples antĂ©-, prĂ©- avant antĂ©rieur, prĂ©avis post- aprĂšs postĂ©rieur, posteriori re- de nouveau recommencer, relire, reprendre III Mouvement PrĂ©fixes Sens Exemples ac-, af-, al-, ap- vers accourir, affluer, allier, apporter en-, em- de ce lieu s’enfuir = fuir d’un lieu, emporter = prendre avec soi en partant d’un lieu rĂ©tro- en retour rĂ©troviseur, rĂ©trograder pro- en avant propulseur, propulser, proposer, projeter trans- au delĂ  de Ă  travers transporter, transformer, transparent loco- mettre en mouvement locomotive, locomotion IV ManiĂšre PrĂ©fixes Sens Exemples co-, col-, con-, com-, cor- avec cohabiter, collaborateur, confĂ©rence, comprendre, correspondre a-, an- sans aphone, amoral, analphabĂšte pro- pour = en faveur de pro gouvernemental anti-, para- contre antivol, paratonnerre tĂ©lĂ©- Ă  distance tĂ©lĂ©commande, tĂ©lĂ©viseur, tĂ©lĂ©phone V Autres prĂ©fixes PrĂ©fixes Sens Exemples dĂ©-, dĂ©s-, ex- cessation dĂ©sunion, dĂ©saccord, ex-professeur, ex-mari il-, im-, ir- in-, im- voyelles nasales nĂ©gation illogique, immoral, irrĂ©el introuvable, incroyable, impossible, imbuvable mĂ©-, mĂ©s- mauvais mĂ©connu, mĂ©sentente bĂ©nĂ©-, bien- bon bĂ©nĂ©vole, bienfaiteur Exercices Exercice 1 page 1/3. Donnez le sens des diffĂ©rents mots. Exercice 2 page 2/3. Choisissez le bon verbe. Exercice 3 page 3/3. Choisissez le bon verbe. Pour voir les suffixes, cliquez sur le lien ci-dessous. Article Toute reproduction est interdite sans accord Ă©crit prĂ©alable. Copyright aoĂ»t 2017 Ivan Bargiarelli Tous droits rĂ©servĂ©s. This website uses cookies to improve your experience. We'll assume you're ok with this, but you can opt-out if you wish. Cookie settingsACCEPT Le langage de l'Ă©cologie dĂ©cryptĂ© dans un livre d'entretiens fort instructif entre le dĂ©putĂ© vert NoĂ«l MamĂšre et StĂ©phanie Bonnefille, maĂźtre de confĂ©rences en linguistique.Pour analyser la vie politique, il ne suffit pas d'Ă©tudier le comportement rationnel des acteurs, comme le fait le plus souvent la science politique, mais il faut prendre en compte des Ă©lĂ©ments aussi cruciaux que le langage, les rĂ©cits et les interventions dans l'espace public. Les campagnes Ă©lectorales mettent en jeu dĂ©sormais des actes de langage  », affirme Christian Salmon, dans la prĂ©face des Mots verts, pour une Ă©cologie du langageL'Aube.Un livre d'entretiens fort instructif, passionnant, sur le langage dans la sphĂšre politique entre NoĂ«l MamĂšre, le dĂ©putĂ© vert de Gironde et maire de BĂšgles et StĂ©phanie Bonnefille, maĂźtre de confĂ©rences en linguistique Ă  l'universitĂ© Bordeaux Montaigne. Christian Salmon est l'auteur d'un superbe ouvrage de dĂ©cryptage, Storytelling, La Machine Ă  fabriquer des histoires et Ă  formater les esprits La DĂ©couverte.Des Ă©changes passionnantsLes Ă©changes entre NoĂ«l MamĂšre et le professeur Bonnefille sont de haute tenue. Et il n'est point besoin d'ĂȘtre Ă©cologique pour apprĂ©cier ces entretiens. Sur le plan du langage, des mots, des reprĂ©sentations, ce livre est le sait, et les auteurs le soulignent, les mots de la politique ne sont pas neutres encore plus, aujourd'hui. Ils sont lĂ  pour servir une idĂ©e, dĂ©fendre une cause, expliciter un projet de sociĂ©té», disent-ils. Ces mots verts» investissent d'ailleurs tous les champs de la sociĂ©tĂ© au point oĂč les deux principaux dictionnaires ont fait entrer ce langage dans leur encyclopĂ©die ces derniĂšres annĂ©es. Le Petit Larousse a admis biomĂ©thane, Ă©coblanchiment, lombricompostage, climatosceptique, Ă©coresponsable, marĂ©e verte, biopĂ©trole, et empreinte Le Petit Robert, la tendance est la mĂȘme, mais avec d'autres mots. On accepte dĂ©sormais viandard, viandarde Chasseur, pĂȘcheur sans scrupule/Personne qui aime la viande, qui en mange beaucoup», alfalfa Luzerne cultivĂ©e, riche en protĂ©ines et en calcium», mara Petite fraise dont le parfum rappelle celui de la fraise des bois». On admet Ă©galement les antispĂ©cistes et antispĂ©cisme IdĂ©ologie qui s'oppose au spĂ©cisme» , le spĂ©cisme est une idĂ©ologie qui postule une hiĂ©rarchie entre les espĂšces. Les deux dictionnaires ont intĂ©grĂ© les mots pour transformer les chosesQuel est le message principal des Mots verts de NoĂ«l MamĂšre? À l'Ăšre d'Internet et des rĂ©seaux sociaux et alors que la planĂšte subit les effets du rĂ©chauffement climatique, le dĂ©putĂ© de Gironde, partisan d'une Ă©cologie politique, invite Ă  changer les mots pour transformer les choses. Il met en Ă©vidence une guerre d'un genre inĂ©dit imposant de mobiliser des qualitĂ©s nouvelles pour penser l' ce projet? Et pourquoi NoĂ«l MamĂšre? En partant des mots et des expressions, de la langue donc, les outils citĂ©s permettent de mettre en exergue et d'interroger le systĂšme de reprĂ©sentations en matiĂšre d'Ă©cologie, de transition, de rĂ©chauffement climatique et de crise Ă©nergĂ©tique», explique StĂ©phanie Bonnefille. Et d'ajouter C'est en comprenant ce systĂšme et en le fissurant, comme Roland Barthes nous invite Ă  la faire dans L'Aventure sĂ©miologique que l'on peut agir dessus, le remanier afin d'expliquer et transmettre plus prĂ©cisĂ©ment le message destinĂ© Ă  l'auditoire. C'est Ă©galement par ce biais que certains processus rĂ©currents de dĂ©sinformation peuvent ĂȘtre mis au jour.»L'affreux greenwashing» ou l'art de l'habillageAu dĂ©but de l'ouvrage, un mot revient souvent greenwashing». Affreux anglicisme qui signifierait habiller d'un vernis Ă©cologique Ă  peu prĂšs n'importe quel produit, pensĂ©e ou situation. Un outil» souvent utilisĂ© par les grandes compagnies qui veulent se montrer Ă©coresponsables ou Ă©thiques. Les hommes politiques, aussi, en usent et sĂ»r, la politique n'est pas absente dans ce livre. MamĂšre critique vertement le prĂ©sident de la RĂ©publique quand celui-ci rĂ©pĂšte Ă  l'envi faire de la France la nation de l'excellence environnementale» ou le Premier ministre qui fait du rĂ©chauffement climatique une grande cause nationale».C'est une hystĂ©risation du discours politique» qui a des visĂ©es Ă  court terme et cible les Ă©chĂ©ances Ă©lectorales se plaint le maire de BĂšgles. Lui-mĂȘme s'appuie sur un langage en crĂ©ant ou en adoptant des expressions vertes pour tenter de convaincre, des expressions telles qu'Ă©cologie citoyenne» ou dĂ©mocratie participative». Des paroles qui commencent Ă  perdre de leur valeur car elles sont utilisĂ©es par tous et Ă  tort et Ă  slogans et des oxymoresPeut-ĂȘtre que l'explication de la perte de vitesse du mouvement Ă©cologique tient-elle dans le langage? À la fin du livre, StĂ©phanie Bonnefille, sans doute en accord avec NoĂ«l MamĂšre la conclusion n'est pas signĂ©e, parle des dangers de la simplification Ă  force de slogans et de mots-clĂ©s, d'oxymores croissance verte» ou charbon propre».Tous les deux rappellent l'habillage cosmĂ©tique du greenwashing». Et, surtout, ils soulignent les Ă©cueils du discours Ă©cologique Trop austĂšre, trop anti-tout, trop complexe parfois, trop revendicatif ou brutal, trop culpabilisant, trop dispersĂ© aussi.» Encore une fois, pas besoin d'ĂȘtre militant Ă©cologique pour apprĂ©cier ce livre. C'est un excellent et salvateur dĂ©cryptage du langage politique au sens Mots verts, de NoĂ«l MamĂšre. Entretiens avec StĂ©phanie Bonnefille, prĂ©face de Christian Salmon. L'Aube, 204 pages, 20 €. 1. Introduction 1 L’évolution sĂ©mantique vers brebis’ s’explique par le fait que les noms en –is Ă©taient gĂ©nĂ©ralem ... 2 Le mot sans distinction de sexe trouve des correspondances en sanskrit, en grec et en ombrien ; d ... 3 Le lat. rustique fēta dĂ©signait la brebis fĂ©condĂ©e, pleine ou qui a mis bas sous *fĕ-, fē... 4 Pour d’autres dĂ©signations, isolĂ©es, en domaine gallo-roman, cf. MĂ©dĂ©lice 1989. 5 Ces formes continuent le pluriel du neutre en –a cela explique qu’elles aient Ă©tĂ© interprĂ©tĂ©es ... 1Dans le domaine roman, les dĂ©signations de la brebis, forment des aires clairement distinctes quatre d’entre elles, couvrant la quasi totalitĂ© de cet espace, sont dĂ©finies par quatre types lexicaux dominants qui continuent, dans l’interprĂ©tation traditionnelle, les formes latines ovis, feta, pecus, vervex. Les aboutissants de ovis, Ă  l’origine mot Ă©picĂšne E. M. sous ouis1, Ă  travers la forme Ă  suffixe diminutif ovicula, se sont imposĂ©s, dans le domaine ibĂ©ro-roman, dans une large partie du centre et de l’ouest de la France occ. [oˈvɛʎo, ˈweʎo, aˈuʎo], oĂŻl [wej]2. feta3 est Ă  l’origine de dĂ©signations d’une vaste aire mĂ©ridionale de la France occitane avec le Languedoc, l’est du Massif Central, la Provence et les Alpes et du domaine francoprovençal [ˈfedo, ˈfeja, fja] se prolongeant, sans discontinuitĂ©, au delĂ  des massifs alpins, sur la majeure partie du PiĂ©mont ; au nord-est de l’Italie, elles forment aussi deux aires dans le Trentin et la VĂ©nĂ©tie4. pecus, neutre collectif, avec le sens de troupeau, bĂȘtail’ couvre la majeure partie du domaine italo-roman it. pecora, corse, gallurien, sassarien pecura5. Dans notre exposĂ© nous nous intĂ©resserons principalement aux continuateurs de vervex ou de *vervix qui connaissent un emploi presque exclusif pour brebis’, dans deux aires distinctes et gĂ©ographiquement Ă©loignĂ©es la Sardaigne et, en France, la majeure partie du domaine d’oĂŻl carte 1. 2Dans la premiĂšre rĂ©gion, Ă  part l’extrĂȘme nord de l’üle dont les parlers sassariens et galluriens emploient, comme ceux de la Corse, des continuateurs de pecora, on relĂšve, Ă  cĂŽtĂ© de [bɛrˈbɛkɛ], phonĂ©tiquement semblable Ă  la base latine traditionnellement admise et caractĂ©ristique de l’aire centre-orientale de l’Île, un grand nombre de variantes phonĂ©tiques, comme [bɛrˈbɛγɛ, bɛrˈbɛɂɛ, alˈvɛγɛ, bɛrˈbɛ] ou la forme mĂ©ridionale [brɛˈÎČɛi], avec mĂ©tathĂšse systĂ©matique de la vibrante caractĂ©ristique de la rĂ©gion Contini 1987, ainsi qu’une grande densitĂ© morphosĂ©mantique [bɛrbɛˈkarju, bɛrbɛˈɣardzu, brɛÎČɛˈɣardÓĄu] berger’ -4700 dans la grotte de Su Carroppu et Ă  Filiestru on a trouvĂ© des os de moutons Ovis aries, en quantitĂ©s presque exclusives dans le deuxiĂšme site. Lilliu 1988 relĂšve que ces derniers appartenaient Ă  des animaux ĂągĂ©s de moins d’un an, d’un Ă  deux ans da macello destinĂ©s Ă  la consommation’ et de plus de deux ans destinĂ©s Ă  la reproduction, ce qui tĂ©moignerait de l’existence de l’élevage. Concernant les caractĂ©ristiques physiques de ces trĂšs anciens paysans/bergers insulaires, Franco GermanĂ  1995 affirme que 7 
de l’analyse des restes humains de ce temps-lĂ , peu nombreux et incertains, nous pouvons seule ... .. dall’analisi dei pochi e dubbiosi relitti umani di quel tempo noi possiamo soltanto desumere che nel neolitico antico i paleosardi avessero una morfologia probabilmente afro-mediterranea o mediterranea occidentale, senza che pero’ si possa escludere la copresenza di forme danubiane o mĂ©diterranĂ©e orientali »7. 6L’hypothĂšse d’une provenance de vervex de la MĂ©diterranĂ©e orientale semble aussi plausible les contacts de la Sardaigne avec cette aire, dĂšs le nĂ©olithique, se poursuivant durant les diffĂ©rentes phases de la culture nouragique et, plus tard, tut le long de la profonde colonisation phĂ©nicienne et punique, ont Ă©tĂ© confirmĂ©s par les recherches archĂ©ologiques. En parlant de la Culture Ozieri’ ou de San Michele’ nĂ©olithique moyen, l’illustre archĂ©ologue Lilliu a mis en Ă©vidence les liens Ă©troits de cette derniĂšre avec les cultures de l’est de la MĂ©diterranĂ©e, en particulier pour ce qu’il dĂ©finit comme i segni della religione » les tĂ©moignages de la religion’ figures schĂ©matiques de tĂȘtes de bovidĂ©s, reprĂ©sentations du Taureau et de la DĂ©esse MĂšre avec les nombreuses petite statues en marbre de cette derniĂšre, d’origine cycladique, reprĂ©sentant la coppia della religione erotica-naturistica protosarda » le couple de la religion Ă©rotico-naturaliste protosarde’. Il insiste aussi frĂ©quemment sur la parentĂ© entre les vases de la mĂȘme Culture’ sarde et leur dĂ©coration avec ceux de plusieurs rĂ©gions mĂ©diterranĂ©ennes MĂ©sopotamie, Egypte, Chypre, CrĂšte, Cyclades, Malte, Sicile et signale aussi des correspondances avec la culture balcano-danubienne de Vucedol. Toujours Ă  propos de la Culture Ozieri’, GermanĂ  1995 rappelle 8 .. ses frĂ©quents points de rĂ©fĂ©rence cycladiques’ qui s’expriment dans la morphologie de ses mo ... 
 i suoi ricorrenti punti di riferimento cicladici », che si esprimono nella morfologia dei suoi monumenti piĂč caratteristici sia per i vivi che per i morti , nei suoi raffinati prodotti industriali e nel genere di vita dei suoi diffusori »8. 9 A ce propos Lilliu 19672 24 Ă©crit È superfluo avvertire che quando accenniamo a elementi ... 7L’existence de contacts importants avec le monde grec est confirmĂ©e par l’abondante cĂ©ramique mycĂ©nienne du Nuraghe Antigori, sur le Golfe de Cagliari. Pour conclure et sans sous estimer les contacts et les Ă©changes avec les rĂ©gions riveraines de la MĂ©diterranĂ©e occidentale Italie tyrrhĂ©nienne, France cultures de Bougon et de Chassey9, PĂ©ninsule IbĂ©rique - que l’on pense Ă  l’exportation de l’obsidienne de Monte Arci - les liens culturels de la Sardaigne avec la MĂ©diterranĂ©e orientale semblent avoir Ă©tĂ© largement dominants. A notre avis, c’est dans les langues parlĂ©es dans cette derniĂšre, que les milliers de micro-toponymes prĂ©latins de l’üle, pourraient bien avoir leurs racines. Notre vervex a pu arriver en Sardaigne directement, de l’orient de la MĂ©diterranĂ©e, dĂšs le nĂ©olithique ancien, avec l’introduction des ovins dans l’üle sans que l’on puisse connaĂźtre le sens prĂ©cis du terme. L’élevage de cette espĂšce devait connaĂźtre par la suite un dĂ©veloppement considĂ©rable surtout au nĂ©olithique rĂ©cent oĂč se manifeste dĂ©jĂ  une certaine unitĂ© culturelle de l’Île, unitĂ© qui allait s’affirmer Ă  l’ñge du bronze avec la culture nouragique. Les mĂȘmes peuples de navigateurs censĂ©s avoir importĂ© vervex en Sardaigne ont pu introduire le mot, avec l’élevage du mouton, dans d’autres parties des cĂŽtes de la MĂ©diterranĂ©e occidentale, de la mer TyrrhĂ©nienne jusqu’au golfe du Lion et aux cĂŽtes de la PĂ©ninsule ibĂ©rique. DEI sous berbice signale des survivances du mot dans la toponymie dialectale de l’Italie mĂ©ridionale Vervece Campanie, Verbicaro Calabre noms de rĂ©cifs’. De rares exemples se rencontrent aussi en domaine ibĂ©ro-roman judĂ©o-espagnol barvĂ©s brebis’ et le cat. bargera troupeau de bovins et de moutons’ REW 9267. Pour ce qui concerne la France mĂ©ridionale, la prĂ©sence du mouton est attestĂ©e, dĂšs le milieu du 6Ăšme millĂ©naire Helmer 1992 ; Vigne 2000, Ă  une Ă©poque relativement proche de celle des premiĂšres attestations dans le nord du Pays. Dans cet espace oĂč, aujourd’hui, dominent quasi exclusivement les continuateurs de ovis et de feta les tĂ©moignage de vervex sont peu nombreux Ă  cĂŽtĂ© de l’a. prov. berbitz brebis’ Mistral, dĂ©jĂ  signalĂ©, on relĂšve le limous. berbi id.’ ou le bĂ©arn. berbis, brebit ALF 173 ; Palay sous berbis et des variantes morphosĂ©mantiques l’ berbiguier berger’, Saugues bardzĂ©jra rĂ©cipient pour porter la soupe au berger’ all. Bruch fragment’, Ă  travers un mot slave conservĂ© dans plusieurs aires linguistiques srb., bulg. birka brebis avec la laine bouclĂ©e’, tchĂšq. birka mouton ordinaire’ pol. bierka brebis sans queue’. Dans l’espace italo-roman oĂč, Ă  l’exception de la Sardaigne, vervex n’a laissĂ© que des traces sporadiques, les continuateurs prĂ©sumĂ©s de *berr/*barr sont concentrĂ©s surtout dans deux aires l’une, au nord-ouest du Pays, en domaine gallo-italien PiĂ©mont et nord de la Lombardie et l’autre, compacte, sur le versant adriatique Romagne, Marches atteignant aussi le nord de l’Ombrie carte 2 piĂ©m. bero, lomb. ber, bar, Romagne ber, berr, Marches bir, birro bĂ©lier’, ombr. sept. birro id. ; milan. bera brebis’, Tessin, Val Sesia, berĂ­n, berĂ­ agneau’ AIS carte 1069 ; DEI sous bĂšrro carte 2. Nous remarquerons que, dans la premiĂšre aire, les continuateurs de *berr- peuvent dĂ©signer parfois le bĂ©lier et la brebis AIS 149, 155, 243, 263 leur emploi pour le seul mĂąle est cependant le plus frĂ©quent, face Ă  l’emploi exclusif pour la brebis ou pour la brebis et les agneaux AIS cartes 1068, 1071. FEW et DEI signalent le verbe roumain barai conduire les moutons’ ainsi que des exemples en albanais ber brebis’, rappelant les bĂ richoi agneaux’ chez Hesychius Milesius, et ber berger’ et en basque barro agneau d’un an’. FEW ibid. 335, II relĂšve des formes occitanes avec une occlusive sourde probablement apparentĂ©es a. pr. paroc bĂ©lier qui marche en tĂȘte du troupeau’, PĂ©z. parrot, AvĂ©yr. porrot, gasc. perrot id.’. Il rappelle aussi de possibles survivances de *ber avec d’autres domaines linguistiques, comme le prouvent le sl. commun baranz ou le hongr. barang bĂ©lier’ Berneker 1908-1913, de possibles rĂ©miniscences dans les langues germaniques norv. dial. barre bĂ©lier’, sans oublier des dĂ©signations ibĂ©ro-romanes, basques et occitanes du bĂ©lier’ que l’on rattache Ă  une base *marr mais dont la connexion avec *berr ne semble pas Ă©vidente10. On ne peut pas exclure, par ailleurs, une parentĂ© de nos formes avec des dĂ©signations dialectales de l’Italie du nord comme bĂšrro DEI sous bĂšrro, bĂ©ru, bero, baru, biro Cortelazzo e Marcato sous bĂ©ru flocon de laine, mĂšche de cheveux, aux longs poils adj.’, que le Dictionnaire Etymologique Italien reconduit Ă  une base prĂ©latine *berro, un probable relitto mediterraneo di area balcanica’11, Ă  rapprocher de l’adjectif bĂ©rros poilu’ qu’Hesychius Milesius considĂšre comme un terme macĂ©donien et qui, Ă  son tour, pourrait ĂȘtre Ă  l’origine du vĂ©n. et du friul. berra couverture’ XVe s. La rĂ©fĂ©rence Ă  la laine, Ă©lĂ©ment capital dans l’élevage des ovins, serait-elle l’un des possibles motifs Ă  l’origine de *berr dont le sens initial demeure obscur ? La proximitĂ© sĂ©mantique et phonĂ©tique de cette derniĂšre avec vervex ne faisant pas de doute, on pourrait avancer aussi l’hypothĂšse que vervex soit une dĂ©rivation de *berr- dĂ©signant, au dĂ©part, le bĂ©lier. L’existence de formes comme brek et brik bĂ©lier’, formant une aire compacte en Emilie s’étendant aux rĂ©gions limitrophes de la Lombardie Mantoue brik bĂ©lier’ et de la VĂ©nĂ©tie situĂ©es au nord du Po AIS carte 1069, en contact direct avec l’aire de ber/bir du versant adriatique, signalĂ©e ci-dessus, pourrait ĂȘtre un tĂ©moignage de la coexistence des deux dĂ©signations. Dans l’hypothĂšse d’une diffusion chronologique diffĂ©renciĂ©e de *berr et de vervex, dĂ©jĂ  envisagĂ©e ci-dessus, ces formes italo-romanes, classĂ©es comme d’origine incertaine DEI sous bricco5, pourraient reprĂ©senter une rencontre de formes plus anciennes ber, bir, avec le nouveau venu berbec, par le canal balcano-adriatique dont il a Ă©tĂ© dĂ©jĂ  question, les formes bric/brec constituant ainsi un tĂ©moignage de l’avancĂ©e de vervex dans la Plaine Padane. Dans l’aire du domaine d’oĂŻl dĂ©finie ci-dessus, les donnĂ©es de l’ALF, et encore d’avantage celles de l’ALF-RĂ©gions, montrent une situation de cohabitation plus marquĂ©e de trĂšs nombreux parlers diffĂ©rencient le mĂąle et la femelle en employant des continuateurs de *berr- pour dĂ©signer le bĂ©lier et des formes issues de vervex / berbix, pour dĂ©signer la brebis carte 2, situation qui peut ĂȘtre envisagĂ©e aussi dans l’hypothĂšse d’une dĂ©rivation morphosĂ©mantique ces derniĂšres de la base *berr-. Ce dĂ©veloppement rappellerait celui du lituanien, dĂ©jĂ  signalĂ© v. note 2 avec les continuateurs de avis, mot Ă©picĂšne Ă  l’origine, Ă  la diffĂ©rence prĂšs que, dans ce cas, la forme simple est employĂ©e pour brebis’ et la forme suffixĂ©e pour bĂ©lier’. 10Compte tenu de la rĂ©partition gĂ©ographique des ses continuateurs, de la densitĂ© morpho- sĂ©mantique et des connaissances archĂ©ologiques, nous avançons l’hypothĂšse que le mot vervex / *vervix, dĂ©signant Ă  l’origine le bĂ©lier, ne soit pas de dĂ©rivation directe du latin mais qu’il aurait Ă©tĂ© prĂ©sent dans le nord du domaine gallo-roman et en Sardaigne Ă  une Ă©poque prĂ©cĂ©dant la romanisation. Originaire des rĂ©gions orientales du bassin de la MĂ©diterranĂ©e, il aurait pu rejoindre l’Europe occidentale par des voies distinctes par une premiĂšre voie, Ă  partir de la PĂ©ninsule Balkanique et Ă  travers le bassin du Danube, puis du Rhin, il aurait atteint le nord et l’est du domaine d’oĂŻl, et les rĂ©gions alpines des domaines francoprovençal et romanche ; par une deuxiĂšme voie, il aurait atteint l’Adriatique, comme l’atteste sa prĂ©sence en Dalmatie, pour gagner le nord-est de l’Italie et, ultĂ©rieurement, la PĂ©ninsule et la Sardaigne ? ; par une troisiĂšme voie, maritime, Ă  partir de l’est mĂ©diterranĂ©en, il aurait rejoint la Sardaigne et les cĂŽtes de la MĂ©diterranĂ©e occidentale, de la mer TyrrhĂ©nienne au golfe du Lion, en laissant de rares attestations en Italie et dans la PĂ©ninsule IbĂ©rique et des tĂ©moignages plus importants dans la France mĂ©ridionale. 11Le mot semble apparentĂ©, par ailleurs, Ă  une autre base lexicale supposĂ©e, *berr- bĂ©lier’, probablement d’une mĂȘme origine gĂ©ographique sa diffusion pourrait avoir prĂ©cĂ©dĂ© celle de vervex ou ĂȘtre Ă  l’origine de ce dernier. RĂ©sumĂ© Plan Texte Notes Citation Auteurs RĂ©sumĂ©s Cet article prend appui, en en dĂ©veloppant les principales orientations, sur un programme consacrĂ© aux mots de la ville » la ville en tant qu’entitĂ© et les territoires qui la composent. Il s’agit d’identifier, dans diffĂ©rentes aires linguistiques, langues administrantes » d’une part, façons de parler ordinaires d’autre part, et leurs relations, en observant notamment les migrations de termes d’un groupe de locuteurs Ă  l’autre, les changements de sens ou de forme qui les accompagnent et, ainsi, la constitution et les changements de la langue commune. Et de repĂ©rer les systĂšmes classificatoires qui organisent les lexiques, qui se confrontent et qui se transforment. Il est possible de suivre, Ă  travers le temps, des aventures de mots », et de comparer des systĂšmes contemporains ou successifs Ă  partir de corpus homogĂšnes. Parmi les situations qui nourrissent la rĂ©flexion comparative, en permettant de dĂ©gager ce que certains processus ont de singulier ou au contraire de commun, les cas de rĂ©forme rĂ©forme de la ville et celle de ses mots sont particuliĂšrement Ă©clairants. This article develops the main orientations of a programme devoted to the “words of the City” the City as an entity and the territories that constitute it. It is concerned on the one hand, with identifying languages of administration in the different linguistic spaces and on the other, with ordinary ways of talking and their relationship. It particularly observes migrations of terms from one group of speakers to another, the changes of meaning or form which accompany them and thus the constitution and transformation of the common language. It is also concerned with identifying classificatory systems which organise the vocabularies, confront each other and are transformed. It is possible through time to trace the adventure of words and compare contemporary or successive systems from homogeneous corpuses. Among the situations which foster comparative reflection while allowing us to separate that which is particular to certain processes or on the contrary which is common, the cases of reform reform of the City and of its words are particularly de page Texte intĂ©gral 1 PilotĂ© par le PIR-Villes du CNRS et le programme MOST de l’Unesco, le programme Les mots de la vi ... 1Approcher les villes par les mots qui les dĂ©signent et en dĂ©signent les diffĂ©rentes parties ? Depuis fort longtemps, voyageurs et ethnologues, gĂ©ographes et historiens, lexicographes et linguistes ont recueilli des mots de la ville ». Des trĂ©sors ont Ă©tĂ© ainsi rassemblĂ©s, le plus souvent de maniĂšre dispersĂ©e et en marge d’autres prĂ©occupations. Il est rare qu’ils soient mis Ă  profit autrement que pour dresser des listes assorties de dĂ©finitions. L’observateur parfois s’attache Ă  la langue, sa richesse, son Ă©volution, ses particularitĂ©s et guĂšre aux objets du discours. Parfois, Ă  l’inverse, l’attention porte sur ceux-ci et l’on a tĂŽt fait de postuler que les mots dĂ©signent simplement des choses qui sont lĂ  avant d’ĂȘtre nommĂ©es. Il est possible, cependant, de regarder les systĂšmes lexicaux comme des traces et des vecteurs de dynamiques sociales qui s’inscrivent Ă  la fois dans la ville et dans le langage. Les rĂ©flexions que nous prĂ©sentons ici prennent appui sur un programme de recherche, Les mots de la ville », qui s’aventure sur ce chemin et dont elles dĂ©veloppent les principales orientations1. Un Ă©tat des lieux 2 R. Barthes, SĂ©miologie et urbanisme », in L’aventure sĂ©miologique, Paris, Seuil, 1985, p. 261. Cf ... 2L’idĂ©e, tout hugolienne, que la ville est un livre ouvert et son espace une sorte de langage, ou d’écriture, est familiĂšre. Roland Barthes l’avait ravivĂ©e Ă  la fin des annĂ©es soixante, mais son propos Ă©tait sans doute trop gĂ©nĂ©ral pour constituer un vĂ©ritable programme de travail. Se dĂ©finissant lui-mĂȘme comme un amateur, amateur de signes, celui qui aime les signes, amateur de villes, celui qui aime la ville », il insistait notamment sur l’intĂ©rĂȘt d’en multiplier les lectures2. 3 On trouvera des rĂ©flexions sur l’état du champ, qui incluent un retour sur des recherches plus anci ... 4 Cf. notamment les travaux de J. Castex et P. Panerai en particulier in SĂ©miotique de l’espace, Par ... 5 À l’échelle de la ville, R. Ledrut a soulignĂ© la difficultĂ© d’une entreprise sĂ©miologique Les imag ... 3De nombreuses recherches, parfois inspirĂ©es de Greimas ou Umberto Eco, qui considĂšrent l’espace comme un langage non verbal, aprĂšs une pĂ©riode d’engouement, sont tombĂ©es dans l’oubli, voire la dĂ©prĂ©ciation. Cela ne doit pas en occulter l’intĂ©rĂȘt, au moins mĂ©thodologique3. L’échelle qu’elles ont retenue est plutĂŽt celle des bĂątiments, dont elles dĂ©composaient les Ă©lĂ©ments pour en identifier les niveaux de signification et en dĂ©gager les articulations. Ce courant a Ă©galement suscitĂ© une approche syntaxique » de l’espace bĂąti, considĂ©rĂ© du point de vue de la matĂ©rialitĂ© de ses formes et des formes de sa matĂ©rialitĂ©4, en somme une approche structurale se situant au seul plan des signifiants. Il ne s’agit plus dans ce cas d’une sĂ©miotique Ă  proprement parler qui Ă  l’échelle de la ville5, doit aussi s’intĂ©resser Ă  la production et Ă  la lecture du sens. 6 La formule est de E. NoĂ«l, in E. NoĂ«l et G. Minot, eds, L’espace et le temps aujourd’hui, Paris, Se ... 7 F. de Dainville, Le langage des gĂ©ographes, Paris, Picard, 1964. 8 Mythe et pensĂ©e chez les Grecs, Paris, Maspero, 1965. 9 Cf. la synthĂšse de Calvet, Les voix de la ville. Introduction Ă  la sociolinguistique urbaine, ... 10 À propos de la notion de malentendu, cf. plus particuliĂšrement J. Gumperz, Engager la conversation. ... 4La vague sĂ©miotique des annĂ©es soixante et soixante-dix a peut-ĂȘtre eu pour effet que l’on mĂ©connaisse d’autres recherches, menĂ©es dans le domaine de la linguistique entendue dans un sens non analogique. Des approches diverses ont en commun de s’intĂ©resser Ă  la maniĂšre dont le langage ordonne, informe l’espace, ou Ă  la langue en tant qu’elle est aux prises avec l’espace et le temps6 », avec les relations qu’entretiennent mĂ©moire et territoires. La dialectologie, la socio ou l’ethnolinguistique, et la sĂ©mantique identifient des champs au sein desquels les mots jouent » en s’appliquant Ă  des toponymes, Ă  des dĂ©nominations, Ă  des catĂ©gories, en traitant des matĂ©riaux divers, comme des corpus cartographiques7 ou des mythes – que l’on pense aux travaux fondateurs de Jean-Pierre Vernant8. Elles ne s’intĂ©ressent pas seulement aux mots de l’espace, aux dĂ©nominations, mais aussi aux façons distinctives de parler dans l’espace9 la ville est constituĂ©e de territoires dont les limites sont plus ou moins nettes, plus ou moins permĂ©ables ou Ă©tanches, stables ou plastiques, oĂč les identitĂ©s religieuses, culturelles, sociales s’expriment, se rĂ©vĂšlent, s’affichent, se trahissent, ou se dissimulent, et interagissent. Les topographies qui se dessinent de la sorte, que l’on cartographie dans des atlas, rendent compte de la diversitĂ© linguistique qui se manifeste Ă  l’échelle de groupes larges. Mais cette diversitĂ© s’observe Ă©galement Ă  l’intĂ©rieur d’entitĂ©s plus restreintes, comme une famille, ou encore chez un locuteur qui peut recourir Ă  plusieurs registres en les combinant dans un mĂȘme Ă©noncĂ©, ou en y faisant appel au grĂ© des situations sociales et spatiales auxquelles il est confrontĂ© et selon les positions qu’il occupe ou prĂ©tend occuper, en ajustant avec plus ou moins de talent » ou d’efficacitĂ© sa maniĂšre de parler. En tentant de conjurer l’imprĂ©vu et les risques de malentendu10. 11 M. de Certeau, L’invention du quotidien, Paris, UGE, 1980, vol. 1, Arts de faire, p. 138. 5Il convient d’évoquer aussi les recueils lexicaux qui ont Ă©tĂ© Ă©tablis, Ă  partir de traditions orales, de tĂ©moignages, de corpus Ă©crits et, plus particuliĂšrement, Ă  partir de la littĂ©rature, considĂ©rĂ©e comme un conservatoire des virtuositĂ©s quotidiennes » dont la science ne sait que faire et qui deviennent, bien reconnaissables par les lecteurs, les signatures des micro-histoires de tout le monde11 ». Ils constituent un patrimoine et sauvegardent des parlers menacĂ©s, ils mettent au jour des couches de significations oubliĂ©es. 12 É. Durkheim, Les formes Ă©lĂ©mentaires de la vie religieuse [1912], Paris, Presses universitaires de ... 6Selon une formule de Durkheim, l’espace ne saurait ĂȘtre lui-mĂȘme si, tout comme le temps, il n’était divisĂ© et diffĂ©renciĂ©12 ». Qu’il soit qualifiĂ© indirectement, par la maniĂšre dont on parle dans la ville, ou directement par les mots qui le nomment, le surnomment, le commentent, aux diverses Ă©chelles oĂč il est apprĂ©hendĂ© par l’analyse ou par l’usage quotidien, l’espace est structurĂ© par des diffĂ©rences pratiques et symboliques. Celles qu’institue le langage relĂšveraient, dans le vocabulaire durkheimien, des reprĂ©sentations collectives » ou, dans celui des premiĂšres Annales, de l’ outillage mental ». Toutefois, si l’on suspend la convention de l’analyse synchronique ou – ce qui revient au mĂȘme pour ce qui nous intĂ©resse ici – de la longue durĂ©e », on est conduit Ă  interroger les processus qui produisent et modifient ces formalisations du social. On s’aperçoit alors qu’elles ne sont ni aussi partagĂ©es, ni aussi stables qu’on pourrait le croire. 7S’agissant d’espaces, d’identitĂ©s collectives ou d’institutions, lorsque la langue dĂ©signe des objets », en leur confĂ©rant du sens elle les constitue. L’assignation du nom distingue et regroupe, ordonne et qualifie. Or, l’accord sur ces points est rien moins qu’assurĂ©. Dans des sociĂ©tĂ©s diffĂ©renciĂ©es et hiĂ©rarchisĂ©es de multiples façons, les individus viennent au monde social dotĂ©s de schĂšmes classificatoires diffĂ©rents. Ceux-ci relĂšvent de l’évidence pratique, de postures et de regards qui s’expriment autant dans des façons de faire que dans des façons de dire. Ils permettent Ă  chacun de donner sens Ă  l’espace social et Ă  sa propre position au sein de celui-ci, mais aussi d’organiser ses conduites au mieux des ressources dont il dispose et de ce qu’il conçoit comme ses intĂ©rĂȘts. La reproduction d’un ordre social quelconque tolĂšre fort bien de multiples dĂ©calages entre les schĂšmes classificatoires propres aux diffĂ©rentes positions qui s’y inscrivent, mais elle implique aussi que certains de ces schĂšmes soient l’objet d’un accord suffisamment gĂ©nĂ©ral pour faire tenir l’ordre dans le registre symbolique. Ce sont ces systĂšmes de classement communs qui sont objectivĂ©s dans des institutions et dans une langue officielle, seule lĂ©gitime, qui est, dans les sociĂ©tĂ©s modernes », la langue nationale. 13 Évoquons seulement, dans cette orientation de recherche L. Boltanski, Les cadres. La formation d’ ... 14 De telles propositions furent notamment au principe d’un renouveau de l’histoire urbaine en France. ... 8Depuis une quinzaine d’annĂ©es, des travaux s’attachent Ă  mettre au jour les luttes de classement » – pour reprendre le vocabulaire de P. Bourdieu – qui sont au principe de la dynamique et de l’éventuelle intelligibilitĂ© des classifications relevant du sens que l’on suppose commun dans une sociĂ©tĂ© donnĂ©e13 on sait mieux dĂ©sormais que le langage est vecteur aussi bien qu’indice des conflits et de leurs issues. Ces recherches permettent d’inscrire les systĂšmes lexicaux et leurs changements dans des processus sociaux oĂč les reprĂ©sentations » sont constitutives de la rĂ©alitĂ© ». Elles ne sont plus en effet regardĂ©es comme des redoublements objectifs science, intĂ©ressĂ©s idĂ©ologie ou arbitraires culture d’un monde social qui serait lĂ  objectivement », mais comme des formes de l’expĂ©rience de celui-ci en mĂȘme temps que des moyens pour le changer14. DĂšs lors, les processus classificatoires peuvent ĂȘtre Ă©tudiĂ©s dans de multiples dimensions dont il importe d’observer les relations ils relĂšvent de la pratique et de ses Ă©lĂ©ments matĂ©riels autant que de la symbolisation langagiĂšre, ils impliquent des conflits rĂ©glĂ©s autant que des consensus sociĂ©taux, ils engagent des mises en ordre institutionnelles autant que des assignations de sens locales et fugitives. Langues multiples, langue commune 15 Nous empruntons cette distinction Ă  Milner, in E. NoĂ«l et G. Minot, eds, L’espace et le temps ... 9D’une part une langue administrante », dont la visĂ©e est organisatrice, d’autre part des façons de parler ordinaires, quotidiennes. Deux polaritĂ©s auxquelles correspondent deux types de balisage l’un qui privilĂ©gie les positions relatives des objets les uns par rapport aux autres », et oĂč le sujet n’intervient pas de façon centrale », l’autre qui au contraire implique, pour le locuteur, une nĂ©gociation du sens des mots en fonction des situations oĂč il les prononce15. Du vocabulaire des institutions et des acteurs, professionnels de l’amĂ©nagement, politiques et savants, qui entendent lĂ©gifĂ©rer dans le domaine des mots de la ville, aux lexiques, diversement spĂ©cialisĂ©s, des diffĂ©rentes catĂ©gories de la population, il existe, Ă  un moment donnĂ© de l’histoire, au sein d’une mĂȘme langue, une pluralitĂ© de registres, dont les Ă©carts sont des marqueurs de distances sociales et des indices de conflits sur l’assignation du sens. 10Le point de vue s’enrichit encore si l’on prend en compte la pluralitĂ© des langues. L’axiome qui nous guide dans une entreprise collective portant sur plusieurs aires linguistiques est simple Ă  Ă©noncer chaque langue dĂ©coupe les rĂ©alitĂ©s, urbaines en l’occurrence, de façon spĂ©cifique et, par consĂ©quent, un glossaire universel assurant des Ă©quivalences terme Ă  terme est un non-sens. Il faut comparer des systĂšmes et non postuler des correspondances entre Ă©lĂ©ments. Ce que l’on peut tenir pour une Ă©vidence scientifique se heurte, bien entendu, Ă  une autre, pratique depuis la nuit des temps, le commerce entre groupes linguistiques s’accompagne de traductions. Ce paradoxe classique offre Ă  l’enquĂȘte sur les mots de la ville » de nouveaux objets. 16 M. Bloch, Apologie pour l’histoire ou le mĂ©tier d’historien [1949], Paris, Armand Colin, 1993, p. 1 ... 11Une remarque ici s’impose, dont nous emprunterons la formulation Ă  Marc Bloch. S’interrogeant sur la traduction et relevant que de nombreuses sociĂ©tĂ©s connaissent un bilinguisme hiĂ©rarchique », il avance Cette opposition de deux langues, forcĂ©ment diffĂ©rentes, ne figure, en vĂ©ritĂ©, que le cas limite de contrastes communs Ă  toutes les sociĂ©tĂ©s. Jusque dans les nations les plus unifiĂ©es, comme la nĂŽtre, chaque petite collectivitĂ© professionnelle, chaque groupe caractĂ©risĂ© par la culture ou la fortune possĂšde son systĂšme d’expression particulier16. » En effet, la pluralitĂ© des registres de langues dans une mĂȘme sociĂ©tĂ© urbaine oĂč l’on parle en principe une seule langue nationale entraĂźne des phĂ©nomĂšnes analogues, bien que moins apparents, Ă  ceux que l’on observe dans les villes, nombreuses, oĂč existe effectivement un bilinguisme ou un plurilinguisme, ou bien dans les situations de contact entre langues nationales. Dans tous ces cas, les parlers ou les langues doivent communiquer et les solutions Ă  ce problĂšme seront marquĂ©es par une nĂ©gociation inĂ©gale entre les locuteurs. 12Il n’est donc pas surprenant que l’idĂ©e d’un glossaire universel se double gĂ©nĂ©ralement de la croyance que, dans chaque aire linguistique, un langage noble, technique ou savant serait le langage de tous ou, du moins, le seul lĂ©gitime. Elle postule aussi que, dans les relations entre aires linguistiques ou pays, une langue vĂ©hiculaire, c’est-Ă -dire dominante, puisse ĂȘtre une lingua franca. Dans les administrations des Empires et dans les situations coloniales, la langue vĂ©hiculaire sera gĂ©nĂ©ralement celle de la Puissance centrale ou, du moins, de sa classe dominante. Mais en Europe, dans les rapports entre États-nations, avec l’éclatement des aristocraties francophones et la montĂ©e de nouvelles bourgeoisies, la question se pose dans des termes diffĂ©rents sur fond de concurrence des langues, celle de la nation internationalement dominante tendra Ă  s’imposer soit comme langue vĂ©hiculaire obligĂ©e, soit comme langue de rĂ©fĂ©rence Ă  partir de laquelle seront Ă©tablies les Ă©quivalences. On sait que le français pouvait avoir encore cette prĂ©tention au dĂ©but du xxe siĂšcle et qu’il a Ă©tĂ© remplacĂ© dans ce rĂŽle par l’anglais amĂ©ricain, au moins depuis la Seconde Guerre mondiale. 13Ce qui nous intĂ©resse ici, c’est la quĂȘte d’une langue de rĂ©fĂ©rence commune aux spĂ©cialistes de l’amĂ©nagement urbain lorsque se dĂ©veloppent et s’institutionnalisent des courants d’échanges internationaux qui imposent de pratiquer couramment la traduction – Ă  la fois impossible » et nĂ©cessaire – ou le bilinguisme. Le phĂ©nomĂšne prend sans doute sa forme moderne au xixe siĂšcle. Le commerce et la science sont alors conçus comme porteurs d’une exigence de communication universelle qui se manifeste par l’intensitĂ© croissante des relations internationales dans les milieux industriels, scientifiques et rĂ©formateurs. À partir de 1850, les expositions universelles » rĂ©solvent le problĂšme Ă  leur maniĂšre en adoptant sans Ă©moi la langue du pays organisateur, et la plupart des congrĂšs internationaux font de mĂȘme. Mais, stimulĂ©es par les unes et par les autres, des relations permanentes s’instaurent entre spĂ©cialistes de diffĂ©rents domaines de la connaissance et de l’action et les associations internationales se multiplient. 17 Cf. E. Brian, Y a-t-il un objet “CongrĂšs” ? Le cas du CongrĂšs international de statistique 1853- ... 18 P. Du Maroussem, L’union internationale des enquĂȘtes Ă©conomiques et sociales », Revue d’Économie ... 14On observe qu’une part importante, parfois essentielle, de leur activitĂ©, consiste prĂ©cisĂ©ment Ă  Ă©tablir un langage commun normalisĂ© qui assure l’équivalence des catĂ©gories permettant de dĂ©crire le monde et, du mĂȘme coup, leur traduction univoque dans les diverses langues de leurs membres. Exemple bien connu, l’Institut international de statistique, créé en 1885, travaille opiniĂątrement Ă  dĂ©finir les cadres uniformes d’une observation statistique universelle autorisant la comparaison17. Le mĂȘme projet est exprimĂ© en 1900 par l’Union internationale des enquĂȘtes Ă©conomiques et sociales, tentative sans grand lendemain de constituer un Office international du commerce » Ă  l’image de l’Office international du travail de BĂąle, qui constituera aprĂšs la PremiĂšre Guerre mondiale le noyau du Bureau international du travail. Un des promoteurs de l’initiative constate que, lorsqu’un gouvernement envoie Ă  l’étranger un enquĂȘteur recueillir des renseignements sur des questions Ă©conomiques et sociales, les difficultĂ©s sont encore plus grandes que dans les enquĂȘtes nationales Ici, ce n’est plus seulement une transplantation partielle qu’il faut subir ce sont des argots et des patois nouveaux, des mĂ©fiances, des malentendus, des hostilitĂ©s mĂȘme dĂ©clarĂ©es. » Avec l’Union proposĂ©e, on se mettra d’accord sur les mots Les termes usitĂ©s sont dĂ©finis et forment une sorte de vocabulaire international qui dĂ©termine les Ă©quivalences. » Ensuite, des spĂ©cialistes autorisĂ©s seront prĂȘts Ă  rĂ©pondre Ă  toutes les demandes venues de l’étranger. Le principe chacun son pays, chacun sa langue, dĂ©joue la plupart des causes de retard et de mĂ©comptes. » L’enquĂȘte faite, le travail de traduction s’opĂšre alors18 ». 15Cette conviction ancienne restera au fondement des tentatives rĂ©pĂ©tĂ©es des organisations intergouvernementales de la SociĂ©tĂ© des Nations, puis de l’Organisation des Nations Unies pour produire, dans leurs diffĂ©rents domaines d’activitĂ©, le vocabulaire international » dont elles estiment avoir besoin. Des situations de mĂȘme type sont observables dans les institutions de l’Union europĂ©enne et dans des pays Ă  bilinguisme officiel. Des enquĂȘtes sur les mots de la ville dans ces diffĂ©rents contextes et, plus largement, sur les traductions de textes administratifs, techniques ou savants permettraient d’identifier les solutions successivement retenues et leurs implications Ă  la fois sur l’échange international et sur les diffĂ©rentes langues. Approches 16Interroger ainsi les lexiques conduit Ă  faire appel Ă  des mĂ©thodes et traditions disciplinaires diverses tout en s’efforçant de rĂ©unir les conditions d’une confrontation utile des enquĂȘtes et de leurs rĂ©sultats. 17Si ce n’est pas ici le lieu d’exposer les dispositifs pratiques que nous mettons en place pour permettre le dĂ©veloppement d’une telle entreprise collective, nous pouvons toutefois indiquer ce qu’il nous est permis d’espĂ©rer. Ce qui rend Ă  nos yeux le projet plausible, c’est une conjoncture intellectuelle, relativement synchrone dans plusieurs disciplines des sciences sociales et dans divers pays, qui transforme en objet d’enquĂȘte les catĂ©gories savantes elles-mĂȘmes et leurs relations avec les catĂ©gories communes. Cette attitude renouvelle l’épistĂ©mologie des disciplines en faisant l’histoire et la sociologie de leurs institutions, de leurs pratiques et de leurs concepts. Elle dĂ©signe Ă  l’attention des chercheurs un vaste domaine d’investigation oĂč ils sont eux-mĂȘmes inclus les langages organisateurs du social. Elle crĂ©e le dĂ©placement infime qui permet dĂ©sormais Ă  de nombreuses recherches sur les villes de prendre le temps d’ĂȘtre attentives aux langages des acteurs avant de forger, si elles le souhaitent encore, les bons concepts qui leur permettront de dire le vrai. 19 M. Bloch, Apologie pour l’histoire ou le mĂ©tier d’historien, op. cit., p. 167, 168, 170 et 168. 18La question des mots de la description dans les sciences sociales est Ă©videmment ancienne. Pour n’évoquer qu’une tradition proche, M. Bloch s’est longuement interrogĂ© sur le problĂšme fondamental de la nomenclature » que soulĂšve la pratique de l’historien19. Celui-ci doit-il reproduire ou calquer la terminologie du passĂ© » ou bien effectuer son propre travail de classement » tout en Ă©vitant l’anachronisme ? Comment peut-il transposer des termes d’une autre langue dans la sienne, entreprise grosse de pĂ©rils » ? Que faire du vocabulaire des documents alors que ceux-ci ne livrent que le langage des lettrĂ©s ? De telles questions sont exactement celles que rencontre une recherche sur les mots de la ville ». Et cependant, l’intention qui leur donne sens n’est plus la mĂȘme. M. Bloch visait Ă  retrouver la rĂ©alitĂ© » Ă  travers et malgrĂ© les variations des terminologies d’époque et en dĂ©pit des dĂ©calages entre les changements des choses » et les changements des noms ». Il cherchait du mĂȘme coup Ă  produire des nomenclatures scientifiques qui dĂ©crivent les choses sans les trahir. Notre propos est diffĂ©rent il est de prendre les classements des acteurs, dans toute leur variĂ©tĂ©, comme un aspect de la rĂ©alitĂ© » elle-mĂȘme. Nous pouvons ainsi faire l’économie de la question d’un rĂ©fĂ©rentiel » qui devrait ĂȘtre Ă©noncĂ© dans d’autres mots que ceux que nous recueillons. 19Il s’agit donc de constituer des corpus qui permettent de restituer, pour des groupes relativement homogĂšnes de locuteurs et dans des points particuliers du temps et de l’espace, des usages. Il s’agit aussi d’observer les migrations de termes d’un groupe de locuteurs Ă  l’autre, les changements de sens ou de forme qui les accompagnent et, ainsi, la formation et les changements de la langue commune. Il s’agit, enfin, de repĂ©rer les systĂšmes classificatoires qui organisent Ă  chaque moment les lexiques, qui se confrontent et qui se transforment. L’enquĂȘte porte d’abord sur deux champs sĂ©mantiques limitĂ©s d’une part, les lexiques qui apprĂ©hendent la ville en tant qu’entitĂ© dĂ©signations gĂ©nĂ©riques ou classificatoires des villes, d’autre part, ceux qui nomment les territoires qui composent la ville en particulier les unitĂ©s prenant place entre la sphĂšre domestique et la ville dans son ensemble. 20L’entreprise n’est pas trop difficile, bien que terriblement laborieuse, pour ce qui est des lexiques administratifs, techniques ou savants. Ceux-ci sont importants pour notre projet car, d’une façon ou d’une autre, ils vont s’inscrire dans des institutions et des espaces bĂątis qui constituent le cadre de la vie quotidienne des populations. Les citadins, dans leur diversitĂ© sociale, seront donc confrontĂ©s Ă  une terminologie officielle qu’ils pourront adopter ou refuser, le plus souvent transformer ou dĂ©tourner. Les migrations du lexique administratif dans les parlers communs sont constantes et rĂ©servent bien des surprises. Du jargon de la loi fonciĂšre française de 1957 qui instituait les zones Ă  urbaniser en prioritĂ© » au tu habites la zup ? » d’aujourd’hui, du lexique des fonctionnaires de la Works Project Administration du New Deal amĂ©ricain au this is not a project » de ceux qui, un demi-siĂšcle plus tard, ne veulent surtout pas apparaĂźtre comme habitant un logement municipal, sont intervenus Ă  la fois un emprunt et un changement de sens. Un cas mĂ©ritant attention, en français, est celui des mots zone », zoner », zonard », transformations rĂ©centes de la zone » et zonier » qui, eux-mĂȘmes, rĂ©interprĂ©taient la zone non aedificandi » instaurĂ©e en 1841 en mĂȘme temps que la nouvelle enceinte de Paris. D’autres vocables bureaucratiques, en revanche, ne se sont pas imposĂ©s et restent donc cantonnĂ©s dans les sphĂšres qui les ont produits les boros qui divisent New York n’ont sans doute que des noms propres pour les habitants, les districts » ou communautĂ©s urbaines » françaises sont probablement des notions exotiques pour ceux qui y vivent. 21La circulation de vocabulaire entre le monde politico-administratif et celui des techniciens et savants – ingĂ©nieurs, statisticiens, gĂ©ographes ou sociologues, notamment – est aussi un phĂ©nomĂšne Ă  explorer car, non seulement il contribue Ă  façonner les mots de la ville, mais il est aussi un rĂ©vĂ©lateur des rapports entre ces ordres de pratiques. Dans quelles circonstances des catĂ©gories d’origine purement administrative se solidifient en concepts » dans les disciplines des sciences sociales ? À l’inverse, par quels processus le monde savant fournit-il parfois le langage qui va permettre au monde politique et aux faiseurs d’opinion de mettre en forme des situations de trouble de l’ordre social comme des problĂšmes urbains » ? The inner-city problem » aux États-Unis dans les annĂ©es cinquante et 1960 et ses transformations ultĂ©rieures, le problĂšme des banlieues » en France dans les annĂ©es quatre-vingt et quatre-vingt-dix peuvent ainsi ĂȘtre Ă©tudiĂ©s comme ce qu’ils sont d’abord des faits de langage. 22Les registres de langue que l’on vient d’évoquer sont accessibles dans des corpus Ă©crits, gĂ©nĂ©ralement imprimĂ©s, qui posent surtout le problĂšme de leur extrĂȘme abondance. En revanche les parlers communs requiĂšrent des enquĂȘtes spĂ©cifiques, oĂč l’écoute et l’enregistrement en situation sont privilĂ©giĂ©s. Pour exploiter les corpus ainsi constituĂ©s, il est nĂ©cessaire de les soumettre Ă  des opĂ©rations de transcription qui restituent, non seulement la syntaxe, mais Ă©ventuellement les caractĂšres prosodiques de la parole recueillie, et dont l’oralitĂ© doit ĂȘtre sauvegardĂ©e dans le passage Ă  l’écrit. Lorsqu’il y a diglossie, il arrive que le chercheur rencontre un obstacle qui n’est pas d’ordre mĂ©thodologique. Il tient Ă  une conception selon laquelle le parler n’a pas la lĂ©gitimitĂ© d’une langue et ne saurait ĂȘtre Ă©crit, seule la langue lĂ©gitime – voire sacrĂ©e, lorsqu’elle est celle de la RĂ©vĂ©lation – Ă©tant digne de l’ĂȘtre. 20 L. Febvre, Civilisation. Évolution d’un mot et d’un groupe d’idĂ©es », in PremiĂšre Semaine interna ... 21 II poursuit, dans une direction qui n’est pas la nĂŽtre mĂȘme si la chose avait prĂ©cĂ©dĂ© ; car il ... 23À l’aide de ces diverses sources orales et Ă©crites, il est possible de produire divers rĂ©sultats. Mentionnons seulement deux des genres que l’on peut retenir pour la conduite de l’enquĂȘte et la restitution de ses trouvailles. L’un est ce que nous appellerions volontiers les aventures de mots », rĂ©cits qui s’efforcent de reconstituer, en voyageant entre divers univers de locuteurs pendant des pĂ©riodes suffisamment longues, l’émergence d’un mot, ses changements d’acception et d’usage, les concurrents qu’il rencontre, transforme, Ă©limine ou, Ă  l’inverse, qui entraĂźnent sa disparition. L’exercice est classique et L. Febvre, qui s’y est essayĂ©, nous rassure Faire l’histoire d’un mot, ce n’est jamais perdre sa peine20. » M. Bloch invite aussi Ă  pratiquer cette sĂ©mantique historique » dont il trouve d’ admirables modĂšles » chez Fustel de Coulanges, et prĂ©cise L’avĂšnement du nom est toujours un grand fait en histoire21. » Bien entendu, les risques de l’entreprise sont multiples, notamment nĂ©gliger les systĂšmes dans lesquels le terme qui nous intĂ©resse prend sens, ne pas apercevoir des analogues ou concurrents importants, ignorer les usages qui n’ont pas laissĂ© de traces Ă©crites. Mais les profits ne sont pas moindres les aventures de mots permettent de travailler d’emblĂ©e sur les interactions entre registres et de repĂ©rer les dates et les lieux des innovations et, de cette façon, les contextes sociaux dans lesquels le langage se transforme. 22 Sur les dĂ©finitions des dictionnaires, cf. B. Quemada, Les dictionnaires du français moderne, 1539- ... 23 A. FuretiĂšre, Dictionnaire universel, contenant gĂ©nĂ©ralement tous les mots français tant vieux que ... 24Un autre genre tout aussi classique, mais plutĂŽt pour les linguistes que pour les historiens, est l’analyse synchronique des systĂšmes dans un champ lexical dĂ©fini, qui s’ouvre ensuite sur la comparaison entre systĂšmes contemporains ou successifs. L’enquĂȘte est ici trĂšs diffĂ©rente de la prĂ©cĂ©dente la recherche s’attachant exclusivement aux relations entre Ă©lĂ©ments, l’homogĂ©nĂ©itĂ© et la simultanĂ©itĂ© du corpus sont fondamentales. Une telle mĂ©thode est particuliĂšrement pertinente lorsque les occurrences rencontrĂ©es prennent ou se voient donner la forme de dĂ©finitions qui prĂ©sentent les propriĂ©tĂ©s logiques d’une classification. Les corpus de nature juridique ou les traitĂ©s d’administration se prĂȘtent aisĂ©ment Ă  de telles analyses. Il en est de mĂȘme des dictionnaires de langue, spĂ©cialement ceux dont les auteurs ont adoptĂ© la philosophie de la dĂ©finition parfaite », c’est-Ă -dire par le genre et les traits spĂ©cifiques22. Voyons quelques adresses dans celui de FuretiĂšre, publiĂ© en 169023 BOURG. Habitation de peuple qui tient le milieu entre la ville et le village. Quelques-uns le restraignent aux lieux qui ne font fermez ni de murs, ni de fossez. [
] » Faus-bourg. Habitation de peuple attenant les portes d’une ville. [
] » Bourgade. Diminutif de bourg. » CITÉ. Ville fermĂ©e de murs. [
] Ce mot ne se dit proprement que des villes Ă©piscopales. [
] » Quartier, signifie aussi un certain canton ou division d’une ville. » VILLAGE. Habitation de paysans qui n’est point fermĂ©e de murs, & qui a d’ordinaire une Paroisse. [
] » VILLE. Habitation d’un peuple assez nombreux, qui est ordinairement fermĂ©e de murailles. [
] Ville signifie quelquefois une partie d’une grande ville. La vieille ville, la ville neuve. À Paris il y a Ville, CitĂ© & UniversitĂ©. » 24 Perrot, GenĂšse d’une ville moderne
, p. 28-51. 25Pour les mots retenus ici – aux seules fins d’illustration – deux dĂ©finisseurs emboĂźtĂ©s habitation de peuple » et ville » et un petit nombre de marques spĂ©cifiques le nombre, les murs, l’évĂȘchĂ©, la paroisse, la division dĂ©terminent un systĂšme qui fait de ville », bourg », faus-bourg » et village » des espĂšces du mĂȘme genre, comme par ailleurs ville » dans une seconde acception et quartier », tandis que citĂ© » apparaĂźt comme une modalitĂ© de ville ». Cette hiĂ©rarchisation insolite des catĂ©gories spatiales, repĂ©rable en France Ă  la veille d’une crise des dĂ©finitions urbaines24», appellerait une comparaison avec celle que l’on observe dans d’autres dictionnaires ou documents analogues pour d’autres langues ou d’autres pĂ©riodes. Situations 26Si l’on regarde les mots de la ville comme indices des dynamiques des sociĂ©tĂ©s urbaines qui les crĂ©ent et les emploient, il convient d’ĂȘtre particuliĂšrement attentif Ă  certaines situations susceptibles de nourrir la rĂ©flexion comparative. 27À cet Ă©gard, l’étude de cas de rĂ©forme est Ă©clairante. Admettons d’emblĂ©e l’ambiguĂŻtĂ© du terme la rĂ©forme de la ville et celle de ses mots sont intimement liĂ©es. Depuis les premiers Ă©noncĂ©s d’une question urbaine » au temps des LumiĂšres, diffĂ©rents corps de spĂ©cialistes ont continĂ»ment dessinĂ©, en Europe et en AmĂ©rique du Nord, les figures successives d’un projet modernisateur » ou rationalisateur » sur la ville et la sociĂ©tĂ©. Ils ont inventĂ© des instruments d’observation et de mesure, de diagnostic et de prescription, dont la condition de possibilitĂ© a Ă©tĂ© la crĂ©ation de langages. D’abord savants, confinĂ©s aux milieux rĂ©formateurs et techniciens, ils s’inscriront peu Ă  peu dans de nouveaux dispositifs administratifs et statistiques, et, finalement, dans des espaces oĂč vivront les citadins. 25 H. J. Dyos et D. A. Reeder en ont fait l’esquisse en suivant les pistes offertes par l’Oxford Engli ... 28La rĂ©forme des mots de la ville transforme les objets qu’ils sont censĂ©s nommer. On pourrait sans doute Ă©crire l’histoire du mot slum dans cette perspective25. Terme de l’argot populaire de Londres cant, il dĂ©signe d’abord a room of low repute » ou low, unfrequented parts of the town ». Pendant la majeure partie du xixe siĂšcle, il apparaĂźt par Ă©crit plutĂŽt sous la forme back-slums et, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale, entre guillemets. La montĂ©e du mouvement pour la rĂ©forme du logement conduit alors Ă  une sĂ©rie de transformations le terme reçoit une acception technico-juridique, pour dĂ©signer a house materially unfit for human habitation » et slums passe dans le langage courant, perdant ses guillemets Ă  l’écrit dans les annĂ©es 1880, au mĂȘme moment oĂč suburbs ou suburbia Ă©mergent comme catĂ©gories de la diversitĂ© des noms de lieu. D’un terme vulgaire, stigmatisant et rare, Ă  l’objet indĂ©cis, la rĂ©forme a fait un concept gĂ©nĂ©ral et opĂ©ratoire il est possible dĂ©sormais de dĂ©limiter sur une carte des slum areas. L’histoire continuera au xxe siĂšcle, de part et d’autre de l’Atlantique, marquĂ©e par deux mouvements liĂ©s qui aboutiront Ă  la dĂ©suĂ©tude du terme. D’un cĂŽtĂ©, l’adoption de lĂ©gislations autorisant la dĂ©molition imposera des dĂ©finitions rigoureuses qui ne peuvent se satisfaire du halo de connotations qui accompagnait slums et aboutiront Ă  l’adoption de nouveaux termes techniques » qui permettront du mĂȘme coup d’euphĂ©miser la stigmatisation sociale des habitants aux États-Unis, tenement-house, tenement district, puis deteriorated neighbourhood apparaĂźtront entre les annĂ©es 1890 et les annĂ©es trente. ParallĂšlement, un nouveau regard sur les quartiers populaires apparaĂźt avec l’émergence du travail social » Ă  partir des annĂ©es dix dans ces contextes, les slums de la fin du xixe siĂšcle pourront ĂȘtre Ă©levĂ©s Ă  la dignitĂ© de neighbourhoods ou communities par la grĂące d’un projet de reconstruction des relations sociales. Ce changement rend sans doute possible l’adoption par les city planners amĂ©ricains des annĂ©es vingt du concept de neighbourhood unit qui va s’incorporer pour longtemps au vocabulaire international de l’urbanisme. 26 Cf. M. de Almeida Abreu, Reconstruire une histoire oubliĂ©e. Origine et expansion initiale des fav ... 27 Le mot dĂ©signe un arbuste du sertĂŁo nordestin et, en particulier, la rĂ©gion de Canudos oĂč viennent ... 29L’aventure de favela peut aussi ĂȘtre Ă©voquĂ©e26. C’est d’abord un nom propre peu aprĂšs que les habitants des quartiers de Rio de Janeiro victimes de l’ùre des dĂ©molitions » eurent commencĂ© Ă  envahir de leurs cases » casebres le Morro da Providencia, une des collines du centre-ville, l’usage populaire rebaptise celle-ci, vers 1897, Morro da Favela27 ». Un nouveau type d’habitat de fortune est apparu, distinct par sa morphologie et son illĂ©galitĂ© des habitations collectives dĂ©gradĂ©es du tissu ancien, dĂ©signĂ©es par estalagens et cortiços. Pour les autoritĂ©s comme pour la presse, la Favela » est d’emblĂ©e un anti-modĂšle, associĂ© au crime et au dĂ©sordre, auquel seront de plus en plus souvent comparĂ©s d’autres sites. Des constructions similaires se multiplient en effet sur les escarpements de la ville, mais il faudra attendre les annĂ©es vingt pour que le toponyme soit substantivĂ© favela perd alors sa majuscule, puis les guillemets d’abord utilisĂ©s, pour devenir un nom commun. Favelas donne alors naissance Ă  favelados, une population Ă©tant ainsi dĂ©signĂ©e par son habitat. La nouvelle catĂ©gorie est adoptĂ©e par l’administration municipale lorsque, avec l’Estado Novo, une ambitieuse politique d’éradication devient envisageable dans les annĂ©es quarante sont rĂ©alisĂ©s les premiers recensements des favelas » et celles-ci existent dĂ©sormais de jure. Le terme sera par la suite communĂ©ment utilisĂ© dans d’autres villes, comme SĂŁo Paulo, dont la topographie est pourtant toute diffĂ©rente. 28 A. BarthĂ©lĂ©my, Dictionnaire arabe-français des dialectes de Syrie Alep, Damas, Liban, JĂ©rusalem, ... 29 Nous devons ces derniĂšres prĂ©cisions Ă  Mona Harb-El-Kak qui mĂšne des recherches sur cette rĂ©gion c ... 30Avec le mot arabe dĂąhiya on a l’exemple d’une trajectoire inverse puisque, de nom commun, il est devenu Ă  Beyrouth un quasi-toponyme. HĂ©ritĂ© de la langue classique, et ressortissant Ă  un registre politico-administratif, dĂąhiya employĂ© souvent au pluriel, dawĂąhĂź signifie notamment environs, abords, pĂ©riphĂ©rie, banlieue ». Il semble s’ĂȘtre intĂ©grĂ© dans les dialectes orientaux assez rĂ©cemment dans les annĂ©es trente le dictionnaire de BarthĂ©lĂ©my, tenu pour une autoritĂ© en la matiĂšre, ne mentionne pas encore cette acception, qui figurera dans son supplĂ©ment publiĂ© en 196028. Au Liban, au cours de la guerre civile, il en vient Ă  dĂ©signer couramment et exclusivement la banlieue sud de la capitale, c’est-Ă -dire la banlieue chiite, assimilĂ©e Ă  un espace pauvre, anarchique, illĂ©gal et intĂ©griste. D’oĂč le refus de certains de ses habitants d’utiliser ce terme et la volontĂ© de revenir plutĂŽt aux anciens toponymes, ou de recourir Ă  une dĂ©signation administrative moins connotĂ©e, comme le littoral de Metn sud29 ». 31Slum, favela ou dĂąhiya relĂšvent d’un vaste champ sĂ©mantique, celui de la stigmatisation urbaine, qui se prĂȘte sans doute bien Ă  la rĂ©flexion comparative. En effet, des ressources lexicales variables selon les langues sont travaillĂ©es ici par des processus sociaux et sous des contraintes sĂ©mantiques semblables. L’émergence d’une catĂ©gorie qui, dans le cas de slum et de favela, subsume la diversitĂ© des toponymes n’est-elle pas liĂ©e Ă  une opĂ©ration cognitive de diagnostic elle-mĂȘme subordonnĂ©e Ă  des objectifs de rĂ©forme ? De simples tableaux chronologiques peuvent ĂȘtre sur ce point trĂšs Ă©clairants. On observe, Ă  divers moments de l’histoire, que plusieurs vocables sont susceptibles de fournir la catĂ©gorisation dont la rĂ©forme a besoin leur concurrence n’est-elle pas rĂ©glĂ©e par des contraintes gĂ©nĂ©rales qui conduisent Ă  des solutions diverses selon les contextes d’énonciation et, bien entendu, les ressources lexicales de chaque langue ? Ainsi, les mots de la stigmatisation urbaine ont pour propriĂ©tĂ© commune d’exprimer sur le registre de l’habitat et de l’espace une stigmatisation sociale qui repose, en rĂ©alitĂ© ou en mĂȘme temps, sur d’autres critĂšres de hiĂ©rarchisation qu’ils font passer au second plan. Comment s’effectue, dans l’un et l’autre sens, le passage de la catĂ©gorie spatiale Ă  la catĂ©gorie sociale ? Ils doivent, en outre, lorsque le projet rĂ©formateur s’affirme, ĂȘtre suffisamment gĂ©nĂ©raux pour ne pas renvoyer Ă  un type morphologique trop particulier, tout en restant suffisamment concrets pour rester proches des images et connotations qui les rendent intelligibles. Ils doivent, enfin, lorsqu’ils se trouvent inclus dans des dispositifs rĂ©glementaires, statistiques ou opĂ©rationnels, ĂȘtre susceptibles de dĂ©finitions juridiques ou techniques univoques qui fassent disparaĂźtre le halo de leurs connotations. Ainsi, les mots de la stigmatisation urbaine peuvent ĂȘtre brutalement pĂ©joratifs dans certains contextes, tandis que, dans d’autres, il est essentiel qu’ils soient massivement euphĂ©misĂ©s Ă©mergent alors les lexiques techniques du sub-standard housing ou du social work, qui vont d’ailleurs jeter un pont entre le vocabulaire de la dĂ©nonciation et celui, plus large, de leur pratique ou discipline. 30 On trouve une manifestation rĂ©cente de cette prĂ©occupation dans R. Brunet, ed., Les Mots de la gĂ©og ... 31 F. de Dainville, Le langage des gĂ©ographes, op. cit., p. 319. 32Un des traits qui apparaissent dans ces exemples est sans doute commun aux processus de rĂ©forme c’est la crĂ©ation de catĂ©gories lĂ  oĂč prĂ©valait la diversitĂ© des noms de lieux ou des notions descriptives, c’est, en d’autres termes, l’instauration de nouvelles Ă©chelles de description, de classement et d’intervention. Il est probable que rĂ©sulte d’un processus de ce genre le mot agglomĂ©ration » qui vient tardivement dĂ©crire une rĂ©alitĂ© physique et spatiale dĂ©connectĂ©e des implications juridiques, administratives et politiques de ville » ou bien, plus tard, metropolitan area qui, parti des États-Unis, fera le tour du monde. Dans de telles rĂ©organisations, certaines disciplines, avec leur tradition lexicale propre, sont plus que d’autres mises Ă  contribution. Ainsi la gĂ©ographie, pĂ©riodiquement confrontĂ©e Ă  des exigences terminologiques distinguer, gĂ©nĂ©raliser, formaliser
, propose-t-elle de fixer des significations30. Elle rĂ©organise l’espace gĂ©ographique en recourant Ă  des langages techniques, Ă  des parlers rĂ©gionaux, en empruntant Ă  des langues Ă©trangĂšres, ou en lĂ©gitimant des emprunts dĂ©jĂ  effectuĂ©s. C’est ce qu’a mis plus particuliĂšrement en lumiĂšre, pour la gĂ©ographie française, E de Dainville, en soulignant que celle-ci, Ă  l’encontre d’autres sciences, [
] dĂšs le xvie siĂšcle, commence Ă  parler la langue maternelle31 ». 33Dans certains cas, ce qui s’offre Ă  l’observation, c’est une rĂ©forme globale de la langue liĂ©e Ă  un projet national qu’il s’agisse de la rĂ©forme de l’arabe impulsĂ©e au Liban dans la seconde moitiĂ© du xixe siĂšcle donnant naissance Ă  la premiĂšre encyclopĂ©die contemporaine dans cette langue, de celle du turc aprĂšs la fondation de l’État kĂ©maliste ou de celle du chinois par la nouvelle RĂ©publique de Sun-Yat-Sen, nous avons affaire Ă  des interventions volontaristes et coordonnĂ©es dont l’État prend l’initiative ou auxquelles il accorde son parrainage. Dans de telles conjonctures, les lexiques urbains sont bouleversĂ©s avec tout le reste, mais les solutions retenues ont Ă©tĂ© prĂ©parĂ©es et ont fait l’objet de dĂ©bats spĂ©cifiques dans des acadĂ©mies de langue ou des sociĂ©tĂ©s savantes, dans des administrations ou des organisations professionnelles spĂ©cialisĂ©es. La rĂ©forme des mots de la ville est ici mise au service Ă  la fois d’une affirmation identitaire nationale et d’une volontĂ© de faire entrer les villes dans la modernitĂ© situations quasi expĂ©rimentales pour notre recherche. 34Il est aussi des stratĂ©gies moins globales, plus progressives, qui rĂ©pondent Ă  une semblable exigence naturaliser » des notions empruntĂ©es en les intĂ©grant dans la langue indigĂšne, et en mĂȘme temps marquer leur nouveautĂ© par une innovation langagiĂšre – conforme cependant au gĂ©nie de la langue. C’est ce qu’illustre une aventure » empruntĂ©e au monde arabe. Il ne s’agit pas en l’occurrence d’une dĂ©nomination de nouveaux objets » urbains, ou de nouveaux dĂ©coupages, au moyen d’un vocabulaire disponible comme dans le cas des thumn-s, huitiĂšmes », dĂ©signant de nouvelles entitĂ©s administratives qui prĂ©vaudront au Caire Ă  la suite de l’expĂ©dition de Bonaparte et dont l’usage oubliera, de la mĂȘme maniĂšre que pour le mot quartier » en français, sa valeur de fraction – on comptera d’ailleurs aprĂšs quelques annĂ©es plus de huit huitiĂšmes ». Il ne s’agit pas non plus de traductions, de dĂ©calques, de transferts d’une langue Ă©trangĂšre exportatrice de modĂšles, mais d’une invention » qui puise plus directement dans les ressources de la langue indigĂšne. 32 Cf. M. Davie et L. Nordiguian, L’habitat de BayrĂ»t al-QadĂźma », Berytus, Arcbeological studies, v ... 33 Cf. notamment F. Baker, Questions de toponymie », Égypte/Monde arabe, 5, 1991. 34 Nous devons ces prĂ©cisions lexicologiques Ă  A. Le Gall-Kazazian. 35 Arnaud, Toponymie du Caire, Le Caire, CEDEJ-MRC, 1994, p. XIII et 245 sq. 35Le mot qui prĂ©vaut jusqu’au xixe siĂšcle pour dĂ©signer dans le monde arabe un hĂŽpital est un terme d’origine persane, bimaristan ou sa dĂ©formation maristan qui progressivement semble plutĂŽt concerner les lieux oĂč l’on traite les fous. Dans la seconde moitiĂ© de ce mĂȘme siĂšcle apparaĂźt un mot, qui se dit et s’écrit isbitalia ou usbitalia voire sbidal, selon des archives beyrouthines32, dont on reconnaĂźt aisĂ©ment l’origine italienne33. Il semble alors courant dans l’Empire ottoman, et son emploi est attestĂ© en Turquie jusqu’en 1945. Dans les dictionnaires de turc oĂč il figure avec un p, ispitalia Ă  la fin du xixe siĂšcle, on prĂ©cise qu’il dĂ©signe surtout ou qu’il a dĂ©signĂ© Ă  l’origine des Ă©tablissements, appartenant notamment aux communautĂ©s grecques et armĂ©niennes, qui combinent les fonctions d’hospice et d’hĂŽpital34. Ensuite l’emploi d’un mot arabe forgĂ© par les acadĂ©mies de langue au tournant du siĂšcle s’est gĂ©nĂ©ralisĂ© pour dĂ©signer, dans la langue administrative, ainsi que dans le parler quotidien du Machrek, les hĂŽpitaux, selon une acception contemporaine mustachfĂą, le lieu oĂč l’on cherche la guĂ©rison ». Ce terme l’a apparemment emportĂ© non seulement sur la formule plus ancienne dĂąr al-chifĂą, maison de la guĂ©rison », mais sur celui de machfĂą, lui aussi attestĂ©, qui est formĂ© Ă  partir du mĂȘme radical, mais signifie lieu de la guĂ©rison ». Au Caire, si l’on en juge d’aprĂšs les indications figurant sur le plan dĂ©taillĂ© de la ville que l’administration a Ă©tabli Ă  partir de 1909, le mot isbitalia a Ă©tĂ© conservĂ© dans l’appellation des voies ou des places du type rue de l’HĂŽpital français », tandis qu’il Ă©tait remplacĂ© par mustachfĂą dans la dĂ©signation des bĂątiments qui leur avaient donnĂ© leur nom. Et il n’a pas totalement disparu de la langue parlĂ©e35. Au Maghreb, la forme sbital, ou sbitar le r remplaçant le l selon un mĂ©canisme courant, est d’un usage banal. 36 El-SaĂŻd Badawi et M. Hinds, A Dictionary of Egyptian Arabic, Beyrouth, Librairie du Liban, 1986, p. ... 36Ainsi a-t-on procĂ©dĂ© Ă  une double nationalisation » ou arabisation. D’une part pour dĂ©signer un Ă©quipement moderne » Ă  l’occidentale, aprĂšs avoir empruntĂ© un mot europĂ©en Ă  titre transitoire, on l’a abandonnĂ©, dans la langue Ă©crite du moins. D’autre part on n’est pas revenu au terme ancien, un terme certes persan, mais dont l’usage dans les pays arabes remonte au Moyen Âge. Ispitalia, mĂȘme une fois le p devenu b, ne sonne pas encore vraiment arabe et ce n’est que devenu, aprĂšs mĂ©tathĂšse, istibalia, correspondant en Égypte Ă  un registre trĂšs populaire36, qu’il Ă©pouse un schĂšme morphologique parfaitement classique. Ce dernier ajustement n’a pas cependant de fondement sĂ©mantique et l’arabisation est dans ce cas uniquement formelle. Avec mustachfĂą, la rĂ©forme a, elle, produit un mot nouveau authentiquement » arabe, que l’usage social a consacrĂ©, et elle l’a fait en opĂ©rant un choix sĂ©mantique extrĂȘmement prĂ©cis et motivĂ©, tout en appliquant un procĂ©dĂ© permettant d’obtenir, de façon gĂ©nĂ©rative » par dĂ©rivation Ă  partir d’un radical, diverses formes verbales, des substantifs, et en particulier des noms de lieu. 37À plusieurs Ă©gards une telle aventure, qui en l’occurrence n’est pas celle d’un seul mot, a une valeur exemplaire. À ce titre elle pourrait ĂȘtre rapprochĂ©e, et par certains de ses aspects distinguĂ©e, d’autres trajectoires. Sans doute les situations de rĂ©forme – et cela est vrai pour toute transformation dĂ©libĂ©rĂ©e ou non du langage – nous rappellent-elles d’abord qu’une langue a une capacitĂ©, morphologique et phonologique, qui lui est spĂ©cifique pour intĂ©grer de la nouveautĂ© ou en inventer. Et pour opposer une rĂ©sistance, ne serait-ce que par les dĂ©formations auxquelles elle soumet, en se les appropriant, des Ă©lĂ©ments de systĂšmes qui lui sont exogĂšnes il n’y a pas de transfert sans modification. Block devient Ă©gyptien lorsqu’il se prononce bulukk, et hangar », quand au pluriel il se plie Ă  un schĂšme arabe, hanĂąger. 38Plus encore, ces situations attirent notre attention sur la maniĂšre dont des choix sont effectuĂ©s, abandonnĂ©s, adoptĂ©s, intĂ©grĂ©s dans l’usage, sur les moyens mis en Ɠuvre pour les appliquer ou les inflĂ©chir, sur les raisons des succĂšs ou des Ă©checs et les enseignements qu’il est possible d’en tirer. Et la comparaison permet de dĂ©gager ce que certains processus ont de singulier ou au contraire de comparable ». 37 MugĂąwarĂźn fait partie du langage officiel c’est la dĂ©nomination d’une entitĂ© administrative, incl ... 39Les rĂ©sistances ne tiennent pas toujours et seulement Ă  une inertie qui renvoie Ă  la structure de la langue. Elles sont Ă©galement d’ordre sĂ©mantique. Par exemple il y a quelques annĂ©es, pour baptiser » de nouveaux ensembles de logements construits Ă  la pĂ©riphĂ©rie du Caire, les urbanistes Ă©gyptiens, jugeant inadĂ©quat le vocabulaire usuel dont ils disposaient, ont suggĂ©rĂ© l’emploi d’un Ă©quivalent du terme anglais neighbourhood. Pour cela ils ont utilisĂ©, comme cela avait Ă©tĂ© fait pour mustachfĂą les ressources morphologiques de l’arabe. Or le mot retenu, mugĂąwara, a Ă©tĂ© rejetĂ© par les habitants pour lesquels il avait une connotation nĂ©gative. En effet si ce terme peut Ă©voquer la proximitĂ© des lieux saints de l’Islam, il Ă©tait en l’occurrence associĂ© Ă  l’habitation traditionnelle des Ă©tudiants pauvres dits mugĂąwarĂźn, vivant au voisinage ou dans les dĂ©pendances de la mosquĂ©e-universitĂ© d’al-Azhar et des lieux d’enseignement et, par extension, Ă  l’occupation des cimetiĂšres Ă  des fins de rĂ©sidence une vie au voisinage des tombes37. En dĂ©finitive ils ont adoptĂ© ou, plutĂŽt, rĂ©activĂ© » un terme populaire et ancien il n’appartient pas au vocabulaire de la partie moderne de la ville hĂąra. Les amĂ©nageurs croyaient bien faire en rendant dans leur langue une notion venue d’ailleurs, convaincus qu’ils Ă©taient de son caractĂšre positif et cela d’autant plus qu’en arabe l’idĂ©e de voisinage est naturellement » associĂ©e Ă  celles d’hospitalitĂ© et de protection. Les habitants, quant Ă  eux, n’ont entendu » qu’un mot stigmatisant. 40On pense inĂ©vitablement Ă  d’autres termes qui ont pris dans le vocabulaire journalistique et politique français d’aujourd’hui la force d’évidences. Nous relevions plus haut que l’émergence du problĂšme des banlieues » depuis une dizaine d’annĂ©es apparaĂźt d’abord comme un fait de langue. Dans la longue sĂ©rie des mots de la ville qui ont pour fonction de dĂ©signer les territoires de la stigmatisation sociale et d’énoncer un Ă©tat de la question urbaine », il s’agit d’une innovation. Il ne serait pas inutile de localiser les origines de cet usage dans l’espace social, d’examiner comment il est repris par certains locuteurs et contestĂ© par d’autres, bref de l’analyser comme l’indice d’une trĂšs vive lutte de classement. D’autres termes, notons-le, sont en concurrence, dont l’histoire est toute autre citĂ©s » emprunte aux citĂ©s ouvriĂšres » de la fin du xixe siĂšcle, mais aussi au vocabulaire historisant d’un Marcel PoĂ«te qui a lu Fustel de Coulanges et, plus gĂ©nĂ©ralement, des urbanistes des annĂ©es 1910 et 1920 ; les quartiers », dans certaines villes françaises, dit autrement la mĂȘme chose. Et comment parlera-t-on dĂ©sormais des banlieues rĂ©sidentielles » vantĂ©es par les promoteurs immobiliers des annĂ©es soixante et soixante-dix ? VoilĂ  un argument, peut-ĂȘtre, pour passer des excursions Ă©tymologiques sur un mot qui nous soucie Ă  un travail plus mĂ©thodique sur les systĂšmes classificatoires inscrits dans le langage. Haut de page Notes 1 PilotĂ© par le PIR-Villes du CNRS et le programme MOST de l’Unesco, le programme Les mots de la ville » s’attache aux registres de dĂ©nomination de la ville et de ses territoires en usage dans diffĂ©rentes aires linguistiques. Il privilĂ©gie le comparatisme, Ă  l’intĂ©rieur d’une mĂȘme aire et d’une aire Ă  l’autre, et il prend en compte la longue durĂ©e. 2 R. Barthes, SĂ©miologie et urbanisme », in L’aventure sĂ©miologique, Paris, Seuil, 1985, p. 261. Cf. Ă©galement La Tour Eiffel, Paris, Delpire, 1969. 3 On trouvera des rĂ©flexions sur l’état du champ, qui incluent un retour sur des recherches plus anciennes, in S. Ostrowetsky, ed., Sociologues en ville, Paris, L’Harmattan, 1996, troisiĂšme partie, La ville en langue ». 4 Cf. notamment les travaux de J. Castex et P. Panerai en particulier in SĂ©miotique de l’espace, Paris, Gonthier, 1979. 5 À l’échelle de la ville, R. Ledrut a soulignĂ© la difficultĂ© d’une entreprise sĂ©miologique Les images de la ville, Paris, Anthropos, 1973. 6 La formule est de E. NoĂ«l, in E. NoĂ«l et G. Minot, eds, L’espace et le temps aujourd’hui, Paris, Seuil, 1983, p. 223. 7 F. de Dainville, Le langage des gĂ©ographes, Paris, Picard, 1964. 8 Mythe et pensĂ©e chez les Grecs, Paris, Maspero, 1965. 9 Cf. la synthĂšse de Calvet, Les voix de la ville. Introduction Ă  la sociolinguistique urbaine, Paris, Payot, 1994. 10 À propos de la notion de malentendu, cf. plus particuliĂšrement J. Gumperz, Engager la conversation. Introduction Ă  la sociolinguistique interactionnelle, Paris, Minuit, 1989. 11 M. de Certeau, L’invention du quotidien, Paris, UGE, 1980, vol. 1, Arts de faire, p. 138. 12 É. Durkheim, Les formes Ă©lĂ©mentaires de la vie religieuse [1912], Paris, Presses universitaires de France, 1960, p. 15. 13 Évoquons seulement, dans cette orientation de recherche L. Boltanski, Les cadres. La formation d’un groupe social, Paris, Minuit, 1982 ; A. DesrosiĂšres et L. ThĂ©venot, Les catĂ©gories socio-professionnelles, Paris, La DĂ©couverte, 1988 ; J. W. Scott, Gender and the Politics of History, New York, Columbia University Press, 1988 ; C. Charles, Naissance des intellectuels », 1880-1900, Paris, Minuit, 1990 ; C. Topalov, Naissance du chĂŽmeur, 1880-1910, Paris, Albin Michel, 1994 ; G. Noiriel, Socio-histoire d’un concept les usages du mot “nationalitĂ©â€ au xixe siĂšcle », GenĂšses, 20, 1995, p. 4-23. 14 De telles propositions furent notamment au principe d’un renouveau de l’histoire urbaine en France. Cf. Perrot, GenĂšse d’une ville moderne. Caen au xviiie siĂšcle, Paris-La Haye, Mouton, 1975, 2 vol., et B. Lepetit, Les villes dans la France moderne 1740-1840, Paris, Albin Michel, 1988. 15 Nous empruntons cette distinction Ă  Milner, in E. NoĂ«l et G. Minot, eds, L’espace et le temps aujourd’hui, op. cit., p. 224-225. 16 M. Bloch, Apologie pour l’histoire ou le mĂ©tier d’historien [1949], Paris, Armand Colin, 1993, p. 171. 17 Cf. E. Brian, Y a-t-il un objet “CongrĂšs” ? Le cas du CongrĂšs international de statistique 1853-1876 », Mil neuf cent, 7, 1989, p. 9-22, et A. DesrosiĂšres, La politique des grands nombres. Histoire de la raison statistique, Paris, La DĂ©couverte, 1993. 18 P. Du Maroussem, L’union internationale des enquĂȘtes Ă©conomiques et sociales », Revue d’Économie politique, XIV, 1900, p. 640. 19 M. Bloch, Apologie pour l’histoire ou le mĂ©tier d’historien, op. cit., p. 167, 168, 170 et 168. 20 L. Febvre, Civilisation. Évolution d’un mot et d’un groupe d’idĂ©es », in PremiĂšre Semaine internationale de synthĂšse, Civilisation, le mot et l’idĂ©e, Paris, Renaissance du livre, 1930, p. 9, rééd. in Pour une histoire Ă  part entiĂšre, Paris, SEVPEN, 1962, p. 481. Une autre mise en Ɠuvre Travail Ă©volution d’un mot et d’une idĂ©e », Journal de psychologie normale et pathologique, 1948, p. 19-28, rééd. in Pour une histoire Ă  part entiĂšre, ibid, p. 649-658. 21 II poursuit, dans une direction qui n’est pas la nĂŽtre mĂȘme si la chose avait prĂ©cĂ©dĂ© ; car il marque l’étape dĂ©cisive de la prise de conscience » M. Bloch, op. cit., p. 174. 22 Sur les dĂ©finitions des dictionnaires, cf. B. Quemada, Les dictionnaires du français moderne, 1539-1863. Étude sur leur histoire, leurs types et leurs mĂ©thodes, Paris, Didier, 1967, p. 391-464. 23 A. FuretiĂšre, Dictionnaire universel, contenant gĂ©nĂ©ralement tous les mots français tant vieux que modernes,.., La Haye-Rotterdam, A. et R. Leers, 1690, 3 vol. 24 Perrot, GenĂšse d’une ville moderne
, p. 28-51. 25 H. J. Dyos et D. A. Reeder en ont fait l’esquisse en suivant les pistes offertes par l’Oxford English Dictionary, Cf. Slums and Suburbs », in H. J. Dyos et M. Wolff, eds., The Victorian City. Images and Realities, Londres, Routledge and Kegan Paul, 1973, vol. 2, Shapes on the Ground. A Change of Accent, p. 359-386. 26 Cf. M. de Almeida Abreu, Reconstruire une histoire oubliĂ©e. Origine et expansion initiale des favelas de Rio de Janeiro », GenĂšses, 16, 1994, p. 45-68. 27 Le mot dĂ©signe un arbuste du sertĂŁo nordestin et, en particulier, la rĂ©gion de Canudos oĂč viennent de faire campagne les militaires qui obtiennent en 1897 l’autorisation de s’installer sur les pentes du Morro da Providencia. 28 A. BarthĂ©lĂ©my, Dictionnaire arabe-français des dialectes de Syrie Alep, Damas, Liban, JĂ©rusalem, Paris, Paul Geuthner, 1935-1950. C. Denizeau, Dictionnaire des parlers arabes de Syrie, Liban et Palestine supplĂ©ment au dictionnaire arabe-français de A. BarthĂ©lĂ©my, Paris, Maisonneuve, 1960. 29 Nous devons ces derniĂšres prĂ©cisions Ă  Mona Harb-El-Kak qui mĂšne des recherches sur cette rĂ©gion cf. MaĂźtrise de l’espace dans la banlieue sud de Beyrouth. Recompositions territoriales entre pouvoirs publics et intervenants privĂ©s, rapport de DEA, Tours, UniversitĂ© de Tours, 1996, multig.. 30 On trouve une manifestation rĂ©cente de cette prĂ©occupation dans R. Brunet, ed., Les Mots de la gĂ©ographie, Paris, La Documentation française, 1992. 31 F. de Dainville, Le langage des gĂ©ographes, op. cit., p. 319. 32 Cf. M. Davie et L. Nordiguian, L’habitat de BayrĂ»t al-QadĂźma », Berytus, Arcbeological studies, vol. 25, 1987. 33 Cf. notamment F. Baker, Questions de toponymie », Égypte/Monde arabe, 5, 1991. 34 Nous devons ces prĂ©cisions lexicologiques Ă  A. Le Gall-Kazazian. 35 Arnaud, Toponymie du Caire, Le Caire, CEDEJ-MRC, 1994, p. XIII et 245 sq. 36 El-SaĂŻd Badawi et M. Hinds, A Dictionary of Egyptian Arabic, Beyrouth, Librairie du Liban, 1986, p. 18. 37 MugĂąwarĂźn fait partie du langage officiel c’est la dĂ©nomination d’une entitĂ© administrative, incluant une grande partie des cimetiĂšres de l’est et de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier Jean-Charles Depaule et Christian Topalov, La ville Ă  travers ses mots », EnquĂȘte, 4 1996, 247-266. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique Jean-Charles Depaule et Christian Topalov, La ville Ă  travers ses mots », EnquĂȘte [En ligne], 4 1996, mis en ligne le 12 juillet 2013, consultĂ© le 17 aoĂ»t 2022. URL ; DOI de page Auteurs Jean-Charles Depaule Jean-Charles Depaule CNRS, Aix-en-Provence Ă©tudie l’espace habitĂ© des villes du monde arabe contemporain. Il est le coordinateur scientifique du programme comparatif Les mots de la ville » PIR-Villes-CNRS/MOST-UNESCO. Il a rĂ©cemment publiĂ© avec J. Castex et Cohen, Histoire urbaine, anthropologie de l’espace, Paris, Editions du CNRS, 1996. Christian Topalov Christian Topalov CNRS-EHESS est sociologue des cultures et des sociĂ©tĂ©s urbaines. Il a notamment publiĂ© Naissance du chĂŽmeur, 1880-1910, Paris, Albin Michel, de page Droits d’auteur Tous droits rĂ©servĂ©sHaut de page

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